TOUT EST DIT

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vendredi 24 septembre 2010


Au-delà de la guerre des chiffres...

Au-delà d'une guerre des chiffres qui serait drôle si elle n'était désolante, la mobilisation contre la réforme des retraites a, semble-t-il, atteint au moins le même niveau que le 7 septembre. Elle confirme un double mouvement un peu contradictoire, difficile à interpréter pour l'avenir : une contestation qui demeure très importante, en même temps qu'une forme de coup d'arrêt à la progression.

Pari seulement à moitié gagné, donc, pour les syndicats. Et pour cause. Les deux locomotives des grands mouvements sociaux de ces vingt dernières années ont un peu manqué à l'appel pour donner le coup d'accélérateur décisif. Le secteur public, transports en tête, est loin d'avoir donné toute la mesure des aptitudes mobilisatrices qu'on lui connaît. Non concernés directement par la réforme, arc-boutés à une conception très corporatiste du syndicalisme, les cheminots qui avaient tiré les grèves massives de 1995, sont restés largement en deçà de leurs capacités d'action.

Dans le même temps, les jeunes, qui avaient balayé le CPE (contrat première embauche) par leur enthousiasme militant en 2006, n'ont pas traduit leur rejet affiché au projet gouvernemental par un massif passage à l'acte d'opposition. Quant à la troisième locomotive d'appoint possible, celle des retraités, elle n'a pas carburé à plein régime. L'Élysée a réussi habilement à cloisonner les risques, en dissuadant les publics les plus nombreux ou les plus imprévisibles à manifester. En réussissant à les désintéresser, pour bonne part, d'un sujet qui les concerne pourtant au premier chef.Belle réussite de communi-cation.

Pour autant, l'Élysée est loin d'en être quitte. Et a sûrement eu tort de crier prématurément victoire sur le taux de grévistes en baisse. Comme si l'éventuelle résignation de certains salariés valait adhésion à sa réforme ! C'est aller un peu vite en besogne, même si le pouvoir peut tirer de cette journée des indications un peu plus rassurantes pour la suite. Car, après tout, les syndicats semblent désormais avoir du mal à enclencher la marche avant. Ils risquent d'ailleurs d'être débordés parles opposants politiques les plus radicaux, qui rêvent aujourd'hui d'en découdre frontalement.

Mais, même si la réforme des retraites allait jusqu'au bout sans grosse entrave ¯ ce qui reste à démontrer ¯ le gouvernement serait loin d'avoir dissipé tous les nuages sociaux qui pèsent sur le climat. Le débat sur les retraites a enkysté dans l'opinion, notamment dans les classes moyennes, un lourd sentiment d'injustice qui ne va pas s'évanouir comme par enchantement.

Au contraire, ce sentiment pourrait se nourrir et se renforcer au fil des nouvelles mesures de rigueur que le pouvoir commence à distiller, via le rabotage très sélectif des niches fiscales et les efforts un rien discriminatoires annoncés pour sauver l'Assurance-maladie. Avant de s'attaquer sans doute au lourd dossier de la dépendance.

S'il n'y prend garde, Nicolas Sarkozy pourrait être soumis à un réel effet boomerang. Il décrocherait, dans l'immédiat, le certificat de bravoure réformiste qui lui tient tant à coeur pour redorer sa légitimité de général en chef de la droite, mais il récolterait, en 2012, quelques solides déboires dans les urnes.

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