vendredi 21 janvier 2011
Un modèle difficilement transposable
Décidément, l'Allemagne est à la mode. Elle en devient même agaçante, à force de tout faire mieux que nous. Plus d'exportation mais aussi, désormais, plus de consommation. Plus de croissance mais également plus d'emplois. Moins de verbe, plus d'action. Diable ! mais comment fait donc l'élève modèle de la classe européenne ?
Pas de panacée. Proche du Medef, l'institut COE-Rexecode vient nous le rappeler avec une certaine brutalité. La réussite allemande n'est pas issue d'un miracle venu de nulle part, mais de choix politiques clairs et courageux. À bien des égards, le contraire de ce qui se passe de ce côté-ci du Rhin.
Oui, l'Allemagne est, aujourd'hui, en pleine bourre, mais c'est au prix d'un cocktail de rigueur et de volontarisme sans faille. Rigueur assumée dans la maîtrise des salaires et des dépenses publiques, volontarisme revendiqué dans la défense de l'industrie et de l'exportation. En France, on est souvent dans l'incantatoire de la réforme, en Allemagne toujours dans l'exécution.
Le problème, c'est que le jeu des comparaisons France-Allemagne sur le terrain économique devient, aujourd'hui, un véritable jeu de massacre. Trois éléments sont particulièrement inquiétants pour notre avenir.
Un : nous avons perdu ces dernières années l'ultime avantage compétitif qui nous restait à l'exportation : l'atout prix. Nous étions déjà le plus souvent considérés comme moins bons sur la qualité, l'innovation, le design, les services. Et nous voilà, en prime, plus chers !
Deux : notre tissu industriel se délite à grande vitesse - 600 000 emplois perdus en dix ans - alors que l'armada de grandes et moyennes entreprises allemandes se renforce, en évitant à l'occasion de délocaliser, dans l'automobile par exemple.
Trois : l'Allemagne cultive davantage la recherche et l'innovation, tout particulièrement dans l'entreprise. Nos entreprises sont frileuses en recherche-développement parce qu'elles n'ont pas de marges, assure le Rexecode... Il n'est pas interdit d'adopter l'équation inverse : elles n'ont pas de marges parce qu'elles sont frileuses en RD.
Dans ce contexte, nombre de politiques, poussés par un tropisme allemand très prononcé, sont tentés de faire un copier-coller Allemagne-France. Assez peu pertinent. Le modèle allemand n'est pas transposable. Les économies de part et d'autre du Rhin sont trop dissemblables pour pouvoir appliquer les mêmes recettes : l'Allemagne est une vraie nation industrielle, la France l'est-elle encore ? Leurs cultures sont trop opposées, aussi, pour imaginer de dupliquer, sans autre forme de précaution, le pacte social germanique.
Certes la France ne peut, aujourd'hui, en situation de concurrence généralisée, échapper au débat important du coût du travail que privilégie, un peu caricaturalement, l'institut COE-Rexecode. Encore faut-il rappeler que la compétitivité ne se résume pas à un coût salarial. Loin s'en faut. La compétitivité est une équation aux multiples variables - qualité, service, fiscalité, etc. - y compris la variable sociale.
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