vendredi 21 janvier 2011
Mediator, acte II
Après le premier acte, que fut la révélation du scandale sanitaire du Mediator, voici l'acte II, consacré aux responsabilités administratives. Il sera sûrement suivi d'un acte III, relatif aux responsabilités pénales.
L'acte II est ouvert par le rapport de l'Inspection générale des affaires sociales, qui vient d'être publié. Outre les manoeuvres déployées par le laboratoire Servier pour protéger son produit, ce rapport met essentiellement en lumière les défaillances de l'Afssaps, agence publique chargée de gérer les autorisations de mise sur le marché (AMM) des médicaments et autres produits de santé. Cette agence est l'héritière de l'Agence du médicament créée en 1993 sur la base d'une bonne intention. Jusqu'alors, c'était le ministère de la Santé lui-même qui gérait toutes les procédures relatives aux médicaments et notamment la mécanique très lourde des expertises préalables aux AMM. De bons esprits firent valoir que l'Etat était une structure trop rigide pour traiter un tel flux de dossiers et qu'il fallait inventer des structures plus réactives, à la manière dont le Canada, la Nouvelle-Zélande et de nombreux autres pays avaient réformé leurs administrations. C'est l'époque où le sociologue Michel Crozier conceptualisa « l'Etat modeste » et où un rapport de Christian Blanc plaida pour « l'Etat stratège ».
Il en sortit une division du travail où le ministère de la Santé ne conservait que les orientations générales de la politique de santé publique, tandis que la logistique quotidienne de la sécurité sanitaire était reportée sur des agences. Un millier d'agents, deux milliers d'experts, seraient les petites mains de la nouvelle mécanique que l'on espérait plus fluide. Le rapport de l'Igas vient jeter deux pavés dans la belle mare rêvée de cet Etat modeste. D'une part, les agences semblent avoir reproduit les mêmes lourdeurs bureaucratiques que l'Etat d'antan, qu'elles étaient censées dynamiser. D'autre part, et surtout, elles n'ont pas été capables de mieux maîtriser que lui les conflits d'intérêts entre experts et laboratoires. Double et rude défi à relever pour la réforme promise par le gouvernement.
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