TOUT EST DIT

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jeudi 16 décembre 2010

Traiter politiquement la crise de l'euro


À qui le tour ? C'est devenu, depuis près d'un an, la ritournelle des observateurs de la zone euro, fortement secouée sur les marchés financiers par la crise et l'explosion des dettes souveraines. Après la Grèce, l'Irlande, et le Portugal, c'était, hier, au tour de l'Espagne d'alimenter les spéculations. C'est dans ce contexte que s'ouvre, ce soir, un Conseil européen décisif.


Au plus haut niveau et sans trop de précautions de langage, les responsables politiques ont évoqué, ces derniers mois, des hypothèses qui, il y a encore un an, auraient été taboues : la sortie d'un pays de l'euro, son exclusion ou l'éclatement même de la monnaie unique. Le débat sur le retour au mark s'étale dans les colonnes des quotidiens allemands. Le doute est allé si loin, depuis la crise irlandaise, que la crainte actuelle des dirigeants européens est ce qu'ils appellent les « prophéties auto-réalisatrices ».


Bricolé dans la douleur et sous le poids des réticences allemandes, le Fonds européen de stabilité financière a permis, au printemps, de stopper la dérive grecque et d'éviter le pire. À ce jour, seule l'Irlande y a puisé. Et moins de 10 % des 750 milliards d'euros mis sur la table par l'Union européenne et le Fonds monétaire international ont été réellement débloqués. Les Vingt-Sept, réunis ce soir à Bruxelles, ne devraient pas, comme certains le suggèrent, rehausser ce toit.


En revanche, ils vont discuter du mécanisme permanent qui, à compter de 2013, devrait remplacer ce Fonds. Il s'appellera MES, Mécanisme européen de stabilité. Son cadre juridique, qui exige une retouche au traité, et son fonctionnement, qui continue d'exclure toute approche communautaire, font l'objet d'âpres discussions. Car deux philosophies continuent de s'affronter.


D'un côté, la rigueur qu'incarne, revendique et exige l'Allemagne. Aux yeux de Berlin, le mécanisme à mettre en place n'a pas pour but de sauver tel ou tel État membre, mais de sauver l'euro. La nuance est importante. Elle indique un refus clair d'une logique communautaire en matière de responsabilité financière. La voix de l'opinion, hostile à tout transfert financier vers les pays en crise, et le poids de la cour constitutionnelle de Karlsruhe continuent de conditionner fortement les choix de la Chancelière.


De l'autre côté, il y a tout ceux (les pays du Sud, mais pas seulement) qui craignent que le vrai visage de cette rigueur ¯ l'austérité ¯ ne soit socialement insoutenable et économiquement infructueuse en étouffant la relance. La multiplication des manifestations en Europe, de Dublin à Athènes en passant par Rome et même Londres, témoigne de la délicatesse du sujet. Et lorsque le gouvernement Cameron va, bientôt, entamer concrètement son plan de réduction de 500 000 emplois publics sur quatre ans, le flegme britannique va être mis à rude épreuve.


Entre ces deux positions, la France soutient l'Allemagne. Elle estime prioritaire d'apporter une réponse politique aux marchés financiers, quitte à composer avec les exigences de Berlin. Tous deux refusent, pour l'heure, l'idée d'émettre des obligations en euro tant qu'un vrai budget européen n'aura pas vu le jour. En échange, après bien des tergiversations, Angela Merkel a renouvelé son engagement en faveur de la monnaie unique et davantage d'intégration. Il était temps, car il n'y a que par le haut que l'Europe pourra sortir de cette crise.

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