TOUT EST DIT

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jeudi 30 décembre 2010

France-Allemagne : 
double responsabilité

« L'euro ne tombera pas, parce que nous le soutenons de toutes nos forces », a assuré le président de la République lors du dernier sommet de Bruxelles. La crise monétaire est le souci majeur des dirigeants français et allemands. Nicolas Sarkozy et Angela Merkel cherchent les moyens de préserver la monnaie unique, en espérant rallier les autres pays à des propositions communes, au début de 2011.

Rappelons-nous que, sans le moteur franco-allemand, l'Union européenne n'aurait jamais fait de vrais progrès. Le grand moment a été la création de l'euro grâce au trio formé par Helmut Kohl, François Mitterrand et Jacques Delors, dernier grand président de la Commission de Bruxelles. Depuis, le carburant des nouvelles propositions a manqué.

Faisons l'état des lieux. Côté « société civile », tout fonctionnerait bien si la France ne cessait de limiter ses engagements culturels outre-Rhin : suppression des émissions en allemand à RFI, instituts français financés par les villes allemandes, annulation de subventions aux associations s'occupant d'Allemagne... Il faudrait à nouveau soutenir la multiplicité des coopérations de toute nature entre les groupes de nos deux pays.

En matière industrielle, le choc d'intérêts nationaux est inévitable. Mais il pourrait être atténué, surtout si l'on parvient, notamment chez EADS, à constituer un syndicat commun de l'entreprise, au lieu de voir des syndicats antagonistes à Toulouse et à Hambourg. Entre les administrations, en particulier aux Affaires étrangères, la coopération fonctionnerait encore mieux si nos diplomates n'avaient pas l'impression que leur travail est inutile, tout se décidant à l'Élysée.

Les grands projets ne sont pas de saison. Que d'effets d'annonce sans suite au cours des dernières années ! Il y a bien longtemps, en 1974, Jacques Chirac, jeune Premier ministre, déclarait à l'Assemblée : « La politique européenne ne fait plus partie de notre politique étrangère. Elle est autre chose et ne se distingue plus du projet que nous formons pour nous-mêmes. » C'est cela qu'il faudrait mettre enfin en oeuvre et faire comprendre.

Les deux gouvernements pourraient changer de langage. Arrêter de faire croire que le positif est réalisé à Paris ou Berlin, le négatif venant du méchant « Bruxelles ». Montrer les conséquences positives de la quasi-disparition des frontières. Respecter le Parlement européen, ne serait-ce qu'en mettant en valeur ses membres, toujours inconnus et invisibles malgré le sérieux renforcement de leurs pouvoirs. Convaincre les médias de donner enfin à l'Europe communautaire la place qui lui est refusée. Est-il acceptable que TF1 n'ait de bureau ni à Bruxelles ni à Berlin ?

Le couple franco-allemand pourrait-il enclencher le mouvement vers une autorité européenne qui aurait de plus grands pouvoirs en matière d'économie, de finances, d'impôts ? Aussitôt surgirait le mot honni de fédéralisme, rejeté ¯ chez nous en particulier ¯ par tous ceux qui réclament, face aux États-Unis, à la Russie et à la Chine, une Europe-puissance. La cohérence n'est pas leur fort ! Mais même si les progrès sont lents, ils seraient de toute façon accélérés par l'action commune des deux gouvernements pour faire prendre conscience aux deux peuples de ce que représente leur citoyenneté européenne.

(*) Professeur émérite à l'Institut d'études politiques de Paris.

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