Défaite cuisante à la Chambre des représentants. Perte de dix postes de gouverneur. Résistance, sur le fil, au Sénat. Pour les démocrates, le scrutin de mardi est sans ambiguïté. Ce n'est pas une déroute, mais l'avertissement est sérieux. Une majorité d'Américains attendent de leur Président un changement de cap.
Les raisons de cette défaite ont été amplement évoquées avant même le verdict des urnes. Manque de résultats économiques, notamment sur le front du chômage ; vigueur de la contestation populiste du mouvement du Tea Party ; activisme forcené des très puissants lobbies hostiles à la réforme de la santé et à celle de Wall Street ; désaffection des minorités et des jeunes, très mobilisés en 2008. Tout cela est confirmé par le vote.
Ces derniers mois, les responsables démocrates avaient tendance à considérer que leur principale limite n'était pas tant l'action du gouvernement, historique pour certains, que le manque de pédagogie sur le travail accompli par l'administration Obama. Ils vont devoir réviser leur copie. Les sondages à la sortie des urnes montrent clairement la volonté de sanction exprimée par les électeurs.
Aux États-Unis, on n'aime pas tant refaire l'histoire que la faire. Le bilan désastreux dont Obama a hérité il y a deux ans était, de l'avis général, l'un des plus lourds des dernières décennies. Mais ce n'est plus le problème. Sortir de la mauvaise passe de l'automne 2008 était nécessaire ; c'est insuffisant si la relance n'est pas au rendez-vous. Un représentant démocrate, conscient du signal d'alarme, l'affirmait d'ailleurs très clairement, dès hier, dans le New York Times. La seule question qui vaille désormais dans toute action gouvernementale est celle-ci : « Est-ce que cela renforce la croissance économique ? »
L'avertissement est donc limpide, la priorité bien définie. Néanmoins, l'échiquier politique américain n'en ressort pas pour autant simplifié. Loin de là. Sur le plan institutionnel, le pendule électoral ramène la démocratie américaine sur un terrain de cohabitation qu'elle pratique souvent. Avec une Chambre républicaine et un Sénat démocrate, le compromis est, d'ordinaire, incontournable pour gouverner. Mais cette fois, compte tenu de la radicalisation du débat politique, le risque de blocage est bien réel.
Car si les républicains peuvent être très satisfaits de sortir du trou noir dans lequel les avait laissés Bush, la percée du Tea Party flaire plus l'obstruction que le dialogue. Le mouvement populiste n'a pas provoqué un raz-de-marée. Il a même connu quelques revers inattendus. Mais il entre au Sénat et à la Chambre, galvanisé notamment par des succès remarqués, comme celui de Marco Rubio en Floride. En vue de la présidentielle de 2012, cela va peser lourdement sur les orientations du Parti républicain.
Depuis hier, la campagne pour les primaires républicaines est en route. Certes, les tea partiers, pour devenir crédibles, vont devoir sortir de leur posture contestatrice. Mais les sondages montrent que quatre électeurs sur dix du vieux parti sont sensibles à leurs thèses. Leurs représentants clament volontiers qu'ils n'entendent pas se faire récupérer ou phagocyter par les barons républicains. Ces dissensions prévisibles peuvent naturellement servir Obama, mais il aurait tort de trop en attendre. Il a plus à perdre à la paralysie du système que les radicaux.
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