Le score que remportera la puissante institution des Frères musulmans aux élections législatives d'Egypte, dimanche 28 novembre, reste le principal point d'interrogation de ce scrutin en grande partie joué d'avance. Face à l'énorme machine électorale du Parti national démocratique (PND, au pouvoir), auquel tout le monde prédit une large victoire, la Confrérie islamique dispose d'un important réseau de mosquées, d'écoles, de crèches et de centre de soins médicaux – autant de secteurs où l'action de l'Etat est jugée insuffisante par de nombreux Egyptiens – et de la capacité avérée de mobiliser les foules.
Depuis, le gouvernement a mené une campagne de harcèlement à l'encontre de la Confrérie, en multipliant les arrestations de ses membres. Plus de 5 000 d'entre eux ont été arrêtés en 2009. A la veille du scrutin de 2010, ils sont encore plus de 1 000 dans les prisons, dont plusieurs candidats. Plus pénalisant encore, le pouvoir a procédé au gel d'une partie non négligeable des avoirs financiers de la Confrérie.
"La bureaucratie minait nos affaires internes", explique au Monde Mohammed Habib, numéro deux de l'époque, aujourd'hui écarté. "En outre, l'interdiction que le régime fait peser sur les Frères a engendré des auto-restrictions, un repli sur soi de la Confrérie, une propension au secret et, finalement, une situation dans laquelle les décisions ne sont plus prises que par une minorité d'entre nous, aux dépends de notre tradition de consultation. Selon moi, la Confrérie a commencé à souffrir des mêmes maux que le régime égyptien : le manque de démocratie que, justement, nous combattons." M. Habib insiste cependant sur le fait qu'après son départ, la décision de participer aux élections législatives, alors qu'une partie de l'opposition égyptienne appelait au boycot, a été le résultat d'un important débat interne.
Porte-parole de la Confrérie, Essam El-Erian, interrogé par Le Monde juge, au final, "impossible de rééditer le score de 2005", notamment en raison de "l'atmosphère politique étouffante" et du "manque de transparence du scrutin" (la supervision des juges à été supprimée dans les bureaux de vote suite à un amendement constitutionnel de 2007).
Ce constat peu encourageant reste valable aujourd'hui. Les timides ouvertures démocratiques concédées à cette époque par le président Hosni Moubarak ont en outre cédé à une reprise en main très stricte de la vie politique en Egypte.
Selon les spécialistes, les Frères musulmans sont toujours aussi puissants en nombre de militants, voire davantage. Mais les conditions de vote, le contexte international et égyptien – notamment les inconnues et les inquiétudes entourant la succession du président Hosni Moubarak –, estiment-ils, ne leur permettront pas de conserver leur position de principale force d'opposition au sein du Parlement.
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