Depuis son élection, Nicolas Sarkozy a joué deux grands rôles du répertoire économique. Il va devoir en prendre un troisième. Il a d'abord incarné le père Noël de la relance, en distribuant des cadeaux fiscaux ou budgétaires dans tout le pays, un rôle très prisé en France. Il le fut par choix en 2007 à son arrivée à l'Elysée, déversant des milliards destinés à encourager les heures supplémentaires, l'accession à la propriété et la constitution d'un héritage. Il le devint sous la contrainte d'une crise brutale en 2009, mobilisant des allégements d'impôts, la prime à la casse et la stimulation de l'investissement. Sa prestation a été ici classique et efficace sans rien avoir d'exceptionnel. Il en va autrement de son deuxième rôle : capitaine de pompiers, pour éteindre le feu de la crise. Un personnage moins fréquent que Nicolas Sarkozy a joué avec brio, sauvant tour à tour banquiers et constructeurs automobiles, galvanisant l'Europe et chamboulant la gouvernance mondiale avec l'avènement du G20. L'incendie est désormais sinon éteint, du moins apparemment circonscrit.
L'époque impose donc de passer à un troisième rôle : celui de père-la-rigueur, car les caisses de l'Etat sont vides et ses prêteurs deviennent de plus en plus circonspects. Mais c'est un rôle ingrat. Nicolas Sarkozy refuse même d'employer le mot. Il est vrai que ses prédécesseurs n'ont jamais aimé ce personnage impopulaire. Seul le général de Gaulle l'avait assumé sans barguigner. Les autres s'étaient délestés de ce « sale boulot » en le confiant à leur Premier ministre, comme Pierre Mauroy ou Alain Juppé. L'actuel président n'a cependant guère le choix. La croissance étant moins forte que prévu, comme l'a reconnu le communiqué publié après le minisommet gouvernemental du fort de Brégançon, les rentrées fiscales seront moindres. Ayant déjà gelé l'essentiel des dépenses publiques, et refusant de tailler massivement dans les effectifs de la fonction publique comme s'apprête à le faire David Cameron au Royaume-Uni, le président va donc devoir augmenter les impôts. Là aussi, Nicolas Sarkozy a du mal à l'admettre ; on parle donc d'un coup de rabot de 10 milliards d'euros sur les niches fiscales. Tout se passe comme s'il devenait père-larigueur malgré lui.
Lors du remaniement gouvernemental prévu pour l'automne, le président aura la tentation logique de faire jouer ce rôle par le Premier ministre. Il a sous la main un candidat naturel : un certain François Fillon, qui s'échauffe la voix dans ce registre depuis trois ans. Reste à savoir si son maintien à Matignon constitue pour Nicolas Sarkozy un problème ou une solution.
0 commentaires:
Enregistrer un commentaire