TOUT EST DIT

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lundi 23 août 2010

Transparence et délation

Où passe la frontière entre le droit à l'information et le respect de la vie privée - et de la vie tout court ? En juillet, le site Internet Wikileaks, spécialisé dans la divulgation de pièces confidentielles dérobées à des administrations ou des entreprises, avait mis en ligne, à propos de la guerre en Afghanistan, quelques milliers de documents embarrassants pour les autorités américaines. Ces dernières ont reproché à Wikileaks d'avoir rendu publics les noms de personnalités afghanes, les exposant à des attaques ciblées de la part des talibans. Et l'association Reporters sans frontières a adressé récemment une lettre ouverte au patron du site, soulignant son « irresponsabilité ».

Wikileaks fait appel aux dénonciateurs spontanés, en leur garantissant l'anonymat. S'il faut reconnaître l'efficacité d'un tel système pour mettre en défaut des régimes politiques dictatoriaux ou pour débusquer la criminalité en col blanc, on peut aussi se demander où se situent ses limites. Invitation permanente à la délation, de tels sites n'accueillent pas seulement des documents écrits, mais aussi des enregistrements audio ou vidéo. Ils se différencient des places « fourre-tout » comme YouTube parce qu'ils arborent l'étendard du redresseur de torts. Mais qui juge de ces torts ? Un dénonciateur puritain se croira-t-il tenu de divulguer, vidéos à l'appui, les aventures sentimentales ou les préférences sexuelles d'une personnalité politique ou d'un grand patron ?

Paradoxe des opinions publiques, en France notamment, à propos de la « transparence » : on s'offusque de la pose de caméras vidéo dans les lieux publics, la CNIL s'inquiète, au nom de la protection de la vie privée, de la nouvelle génération de compteurs électriques, capables de détailler, poste par poste, la consommation d'un ménage. Mais on applaudit à la divulgation sur Internet de documents volés ou à l'exploit d'un maître d'hôtel qui pose dans un domicile privé un micro susceptible d'enregistrer les propos les plus intimes. A quand les caméras cachées dans les chambres à coucher ?

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