TOUT EST DIT

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vendredi 18 juin 2010

Le symptôme « PKM »

Nul ne le contestera, Pierre Kosciusko-Morizet, l'une des icônes du nouvel entrepreneuriat français, n'a pas usurpé sa réputation. En vendant son groupe de vente en ligne PriceMinister au japonais Rakuten pour 200 millions d'euros, il réalise une formidable opération. Et chacun attend désormais ce que ce créateur d'affaires hors pair, nanti d'un tel pécule, va trouver pour rebondir. Mais au-delà de son sort personnel - il restera le patron de PriceMinister pendant cinq ans -, c'est une autre vision de l'entrepreneuriat que symbolise ce retrait capitalistique. Il est frappant de constater qu'avant « PKM », d'autres jeunes chefs d'entreprise français aussi respectés que lui ont accompli le même mouvement stratégique, celui de vendre leur société au moment où celle-ci avait atteint une première étape de maturité en termes de chiffre d'affaires et de valorisation. Il est tout aussi frappant de voir que, à aucun moment, ces jeunes patrons ne prennent le risque des étapes suivantes, dans le but ultime de faire de leur entreprise un groupe, si possible « mondialisable ».

Alors pourquoi ? On pourrait rapidement en déduire que cette nouvelle vague d'entrepreneurs n'est pas faite du même bois que ses glorieux aînés, ceux de l'âge classique des bâtisseurs qui a vu des Antoine Riboud, Francis Bouygues, Bernard Arnault ou François Pinault s'atteler à bâtir des empires en partant de modestes PME. On pourrait aussi considérer cet état de fait comme une métaphore de notre époque, celle de l'argent facile, vite gagné grâce à l'omniprésence des marchés, mais désormais rétive à toute action qui s'inscrit dans la durée.

Une autre lecture est de dire que derrière l'apparent phénomène générationnel se cache en réalité un changement radical de système que l'on pourrait résumer en une question : Pierre Kosciusko-Morizet pouvait-il faire autrement que vendre ? Quelle chance avait-il de faire grandir son entreprise alors qu'il est implanté sur un marché de 60 millions de consommateurs, autant dire rien à l'échelle planétaire ? Et quel outil, dans notre système financier actuel, lui aurait-il permis de trouver les moyens financiers de long terme l'autorisant à mener à bien une internationalisation ? Le grand changement est que seuls les entrepreneurs situés dans des bassins de consommation de grande amplitude, comme les Etats-Unis ou la Chine, ont aujourd'hui la chance d'atteindre rapidement la taille critique. C'est l'effet paradoxal de la mondialisation : celui d'enlever quasiment toute chance à l'entrepreneur d'un pays faiblement peuplé… de se mondialiser.

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