lundi 4 mars 2013
"Hollande : bluff, surdité, bêtise ?"
"Hollande : bluff, surdité, bêtise ?"
Comme tout un chacun, François Hollande a des défauts. Les siens propres. Mais il faut lui reconnaître une singulière qualité : la persévérance. Sa constance est admirable. Le problème est qu'il la met dans l'erreur, dans la pusillanimité et dans le cynisme. Son erreur initiale fut de se croire plus fort que la réalité avant même d'être élu, puis dès qu'il le fut. Plus fort que son rival, c'est normal, tel est le ressort de l'ambition de tout animal politique. Plus fort que la réalité, c'est en revanche le signe, le mauvais signe de l'aveuglement. Dans son entourage même, des voix s'élevaient déjà durant sa campagne pour mettre en question son analyse. La situation économique de la France était plus sombre qu'il ne le disait. Les remèdes qu'il proposait pour la redresser étaient insuffisants, ils s'inspiraient d'une idéologie inadaptée et d'une méthode contestable. L'accent mis sur la croissance n'était pas en soi une absurdité, mais l'erreur était de confondre la fin et les moyens, c'est-à-dire de faire fi des conditions à remplir pour assurer la croissance, des obstacles à vaincre et des priorités à établir. On ne progresse pas par enchantement.
Les premières désillusions n'y firent rien. Quelques gages de lucidité furent donnés après la publication du rapport Gallois. On commença à comprendre que la croissance dépendait de la compétitivité des entreprises, de l'abaissement du coût du travail et de la réduction des dépenses publiques. Mais, à quelques corrections de tir près, l'esprit et les fondements de la politique initialement choisis restèrent les mêmes. Rien n'a changé depuis. Il y a quelques jours, le président de la République faisait dire par sa porte-parole : "L'inversion de la courbe du chômage d'ici à la fin de 2013 n'est pas abandonnée. C'est un objectif jouable." Et lui-même déclarait superbement : "Il n'y a pas besoin d'ajouter de l'austérité en 2013."
C'est d'une inconscience folle. Bluff, surdité, bêtise ? Tout à la fois. Le taux de chômage est en progression dramatique, les perspectives de croissance réduites à zéro, le déficit public à - 3,7 % en 2013, dix milliards d'économies sont nécessaires d'ici à la fin de l'année, six milliards de recettes supplémentaires en 2014, etc. Et l'on n'aurait pas besoin d'ajouter de l'austérité !... Que signifie alors l'austérité pour M. Hollande ? L'austérité commence sans doute à ses yeux là où la rémunération des fonctionnaires diminue d'un dixième de point ! On ne lui a pas appris à l'Ena et à la Cour des comptes, lui qui n'a jamais exercé la moindre fonction productrice, que taxer à l'infini les entreprises, c'est à la longue générateur d'austérité, aux dépens même de son électorat ? Augmenter les impôts sans diminuer le coût du travail, n'est-ce pas indirectement faire le jeu de l'austérité ? L'expérience ne les instruira donc jamais ? Ni le bon sens ? À la question de savoir où ils trouveront les six milliards de recettes supplémentaires pour 2014, le rapporteur général socialiste du budget à l'Assemblée nationale répondait récemment : "Il me semble qu'il faut se tourner vers les entreprises." Bien sûr !
On veut bien comprendre que le gouvernement cherche à éviter de diminuer le pouvoir d'achat des salariés et de créer une situation comparable à celle dont souffrent les peuples grec, portugais et espagnol, à l'exemple de ce que fit ces derniers mois en Italie M. Mario Monti, qui paie cher aujourd'hui son courage. Mais ce n'est pas davantage aux seules entreprises de consentir aux sacrifices nécessaires au redressement national. Il n'est pas question ici de morale, mais d'intelligence élémentaire. Surtaxer l'appareil productif, c'est hypothéquer son développement. Le faire en affichant de surcroît la haine de l'argent, c'est ajouter le cynisme à la bêtise. Cette erreur restera le péché originel de François Hollande.
Alors que faire ? Un rapport de l'Inspection générale des finances, que Le Point analyse cette semaine, montre de façon éloquente l'une des voies à emprunter pour contribuer à redresser la situation financière dramatique où se trouve la France. Il s'agit de maîtriser les dépenses de l'État par une politique drastique d'économies. Les propositions de l'IGF évaluent à près de 20 milliards d'euros le montant annuel des économies réalisables. Mais celles-ci, il est vrai, induisent une série de réformes qui vont contre l'idéologie de gauche, et concernent essentiellement une population que par tradition et par culture la gauche a sacralisée. Ces réformes exigent un courage dont la droite a souvent manifesté l'intention, une intention que la gauche a systématiquement brisée. Nous pensons notamment, puisqu'il revient au premier plan de l'actualité, au dossier des retraites. Qui ne se rappelle la curée que la gauche a menée contre la réforme Sarkozy, alors qu'aujourd'hui, au mépris de sa propre mémoire, elle s'apprête à la remettre sur le métier ? On attend à l'épreuve François Hollande. L'épreuve de sa vérité.
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