TOUT EST DIT

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vendredi 5 octobre 2012

Hollande et la gauche Grand Guignol

Les psycho-criminologues adorent parler de passage à l'acte mais cette expression s'applique à tout le monde, aux politiciens aussi bien qu'aux amoureux.
Quand il n'est pas inspiré par la folie, le passage à l'acte nécessite ce courage qui, comme disait Stendhal dans sa Chartreuse, "consiste à choisir le moindre mal, si affreux qu'il soit encore".
François Hollande est-il doté de ce courage ? Après le coup de massue fiscal que l'on sait, il faudrait beaucoup de mauvaise foi pour l'accuser de pleutrerie. Il est bien passé à l'acte. Il a même osé annoncer, le bravache, qu'il n'y aurait pas "un euro de plus" d'endettement de l'État à la fin du quinquennat.
Espérons. En attendant, c'est sur les moyens prévus pour y parvenir qu'il y a beaucoup à redire. Au risque de provoquer une récession, le gouvernement va donc faire les poches des ménages et des entreprises pour continuer à nourrir un État ventripotent qui, la panse pleine, continue toujours de crier famine. N'est-il pas temps, au contraire, de le mettre au régime ?
Tel l'amoureux (ou le contribuable) qui remet chaque jour sa déclaration au lendemain, François Hollande hésite, comme Jacques Chirac puis Nicolas Sarkozy, à réduire vraiment ces pharaoniques dépenses publiques qui, en France, sont parmi les plus élevées d'Europe (56 % du PIB, contre 46 % pour l'Allemagne). Ce sont elles qui sont à l'origine de tous nos malheurs, symbolisés par une dette publique qui, après avoir augmenté de 42 milliards entre les deux premiers trimestres de l'année, culmine désormais à 1 832,6 milliards d'euros.
C'est s'exposer à une tempête d'insultes que pointer ce paradoxe : notre administration publique, pourtant si dentue et si coûteuse, est au-dessous de la moyenne sur le plan de l'efficacité quand on compare ses performances à celles des autres pays européens (1). Elle est comme le tonneau des Danaïdes : plus vous la remplissez, plus elle fuit de partout.
Dans Le déni français (2), livre à lire et faire lire d'urgence, Sophie Pedder, chef du bureau de The Economist à Paris, l'explique bien : pour ce qui est du rapport qualité-prix, le compte n'y est pas. Alors que la France dépense plus que d'autres pays pour la santé, l'éducation ou la formation professionnelle, les résultats ne suivent pas, loin de là.
Le chapeau est trop grand pour François Hollande : il serait injuste de le lui faire porter, même si la gauche a historiquement sa part dans le grand désastre national que nous vivons, résultat de nos "Trente Piteuses" qu'il faudrait rebaptiser les "Trente Honteuses". Trente ans que de calamiteux politiciens de droite ou de gauche, sans foi ni loi et ne voyant jamais plus loin que le bout de la prochaine élection, ont plombé les finances du pays, sous prétexte de relancer la croissance et de grappiller quelques points dans les sondages. Tel est leur lamentable legs au pays. S'ils ont une conscience, ils sont à plaindre.
Au cas où François Hollande voudrait réussir et pas seulement plaire à la gauche Grand Guignol, antieuropéenne et bouffeuse de riches, il ne peut décemment se borner à des hausses d'impôts. Le scénario est déjà écrit : relevant d'une vision mécanique de l'économie, elles déprimeront davantage le pays sans rapporter autant que prévu.
Désolé de jouer au "Monsieur-faut-que-ça-rate", mais le choc fiscal ne résoudra rien tant que le pouvoir n'aura pas réduit les bourrelets de l'État, quitte à investir plus dans la recherche et l'éducation. Sans oublier de traiter les deux sujets qui, après avoir si longtemps tétanisé la droite, font hurler la vieille gauche décatie : la compétitivité et la flexibilité qui, seules, peuvent relancer la machine économique.
En ce qui concerne la première, ce ne fut que du bonheur d'entendre, par la bouche du Premier ministre, que la baisse du coût du travail n'était plus un sujet tabou. L'idéologie dominante, pas seulement à gauche, a longtemps interdit de soulever cette question, sous peine d'être traité aussitôt de suppôt du grand capital, complice des exploiteurs et buveur de sang du pauvre. Si, depuis la création de l'euro, le coût salarial par unité produite a progressé de 30 % contre 7 % en Allemagne, c'est qu'il y a un problème, identifié depuis longtemps : des charges excessives en comparaison de celles de nos concurrents. D'où la désindustrialisation rampante. D'où la baisse de la part des exportations françaises dans les échanges mondiaux, passées de 5,7 à 3,3 % en dix ans. D'où, enfin, l'abyssal déficit du commerce extérieur qui, à 70 milliards d'euros, l'an dernier, fait froid dans le dos.
Pour redresser vraiment le pays, François Hollande doit rompre. Avec son programme, avec la gauche Grand Guignol et avec le radical-attentisme qui aura été l'idéologie des trois derniers présidents des "Trente Honteuses".
1. Selon une étude de la Banque centrale européenne.
2. JC Lattès. On ne se lassera pas également de recommander la lecture de Réveillez-vous !, de Nicolas Baverez (Fayard), et de Qui va payer la crise ?, de François Lenglet (Fayard).

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