Les préjugés anti-Roms ont la vie dure. A chaque fois que la question revient sur le devant de la scène,
les sites d'infos sont submergés de commentaires haineux. Pour Olivier
Legros, du réseau Urba-Roms, la violence de la réaction des Français a
une explication logique.
"Ils peuvent te tuer, t'enterrer pour un Twix et continuer leur vie
normale sans remord", "Parce que vous croyez vraiment qu'ils vont se
bousculer au portillon de Pôle Emploi pour chercher du travail? Les
alloc familiales, par contre..." Ce ne sont que quelques exemples de
commentaires parmi les nombreux messages de haine qui figurent sous les articles en ligne consacrés aux Roms. Ce mardi, ils sont encore nombreux sur l'article concernant l'expulsion d'un camp à Saint-Priest.
On leur reproche leur nomadisme, leur supposée saleté ("Je rêverais de
Roms bien rasés..."), on les accuse de paresse ("Du travail? Ils n'en
veulent pas!"). Un cauchemar pour les journalistes qui modèrent et font
face à cette accumulation de clichés discriminatoires dont les auteurs
ne semblent même pas avoir conscience qu'ils franchissent la ligne
jaune. Sur L'Express.fr, 40% des commentaires qui leur sont consacrés en
moyenne sont modérés et donc mis hors ligne, contre 20% pour l'ensemble
du site.
Pourquoi les Roms, qui ne sont qu'environ 15 000 en France, sont-ils si mal aimés? Olivier Legros, maître de conférences à l'Université de Tours et membre du réseau Urba-Rom,
explique: "Le problème, c'est leur visibilité. Il y a de nombreux Roms
originaires de Roumanie, ou de Bulgarie qui vivent en France depuis
longtemps, qui ont d'ailleurs la nationalité française et qu'on ne voit
pas. Les Roms qui font l'objet d'attaques racistes sont ceux dont les
pratiques de survie sont visibles. Ils habitent dans des bidonvilles,
font la manche et sont, pour beaucoup de gens, forcément en situation
précaire. Chez certaines personnes, cette visibilité provoque une
réaction de compassion et d'aide. Chez d'autres, l'amalgame n'est que
trop vite fait. Pour beaucoup de Français, le mot 'Rom' est devenu
synonyme de peuple misérable et potentiellement dérangeant pour le reste
de la population."
"Une stigmatisation exacerbée par les politiques"
Ce spécialiste de la question confie avoir été "choqué par la violences des attaques dont ils sont victimes". "Cela peut s'expliquer également par le fait que notre société ait besoin d'un bouc émissaire. Les Roms sont en quelques sortes sacrifiés et soumis à la violence collective d'une société qui traverse une période de crise. C'est également ce qui se passe en Europe de l'Est avec la montée de ce que l'on appelle 'l'antitsiganisme'. Cette poussée croît à mesure que les situations économiques et sociales de ces pays se détériorent. Il s'agit là du même mécanisme."Olivier Legros dénonce également la communication politique qui a largement contribué à renforcer ce racisme anti-rom. "Leur stigmatisation a été largement exacerbée par les pouvoirs publics, et particulièrement les hommes politiques. On se souvient du discours de Sarkozy, ou des propos de Brice Hortefeux qui les ont pris pour cible en commettant consciemment l'amalgame Roms égal délinquance. Cette stratégie de communication politique bien huilée a renforcé l'hostilité générale envers les Roms."
En fin de compte, "C'est notre responsabilité à tous de ne pas reproduire les raccourcis utilisés par les hommes politiques, les médias ou même certains scientifiques. Soyons vigilants avec les termes que nous employons."
0 commentaires:
Enregistrer un commentaire