Le tic est déjà ancien ; mais sa généralisation confine aujourd’hui au pataquès. C’est ainsi qu’une radio nationale a annoncé qu’un cambrioleur avait été tué par un bijoutier au moment où il venait « récupérer » les bijoux du coffre. “Récupérer”, si l’on en croit le Petit Robert, veut dire « rentrer en possession de ».
Dès lors, ou bien le cambrioleur, s’il venait récupérer des bijoux, c’est-à-dire rentrer en possession de bijoux qui lui appartenaient, n’était pas un cambrioleur, ou bien, s’il l’était vraiment, les bijoux ne lui appartenaient pas et il ne pouvait que difficilement les récupérer. Le même jour, comme une autre radio nationale nous interrogeait sur le français tel qu’on le parle ou le déparle, nous avons cité ce mot si malheureux – et bien mal nous en prit : on nous remontra que le sacro-saint “usage” voulait, c’est-à-dire exigeait, que l’on dît maintenant “récupérer” dans le sens nouveau que l’on entend partout – qui n’est rien d’autre qu’un contresens. Ce sont les mêmes qui crient au fascisme à la moindre règle de grammaire ou au moindre scrupule sémantique qui exigent pour les caprices et les bévues de l’“usage” le respect le plus absolu. Il est curieux comme ce genre d’esprits passe vite d’“il est interdit d’interdire”, la maxime dont, en bons enfants du siècle, ils se flattent, à “il est interdit” tout court. Les gardes champêtres ne sont pas toujours là où l’on croit…
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