TOUT EST DIT

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dimanche 13 mars 2011

Strauss-Kahn est décidé

Le directeur général du FMI dévoile son ambition présidentielle sans prononcer les mots. 
 "So, should I go? Should I run?" ("Dois-je y aller? Dois-je me présenter?"), demande en anglais, Dominique Strauss-Kahn souriant à Bill Clinton, hilare. La scène est étonnante. Les Français sont impatients, ils scrutent le moindre signe de DSK pour savoir si, oui ou non, il va se présenter à l’élection présidentielle et lui s’amuse. Sonde l’ancien président américain. On n’entend pas Clinton répondre à l’actuel directeur général du FMI. Mais DSK, assis dans un fauteuil blanc, ce 15 janvier 2011, à Paris, se souvient de cet aparté à Yalta, en octobre 2010: "Un politique, un ancien président des Etats-Unis […] vous disent: 'il faut y aller, évidemment', parce qu’ils sont dans la vie politique, eux. Ils ne sont pas dans ma position, moi qui ai choisi de m’abstraire de la vie politique au moins pour un temps et d’occuper des fonctions dans un organisme international. Donc, évidemment, leur réponse c’est, oui, il faut aller au combat."
Yalta est un moment clé de ce très beau documentaire de Nicolas Escoulan, Un an avec DSK . DSK est avec les siens, il a l’air d’avoir décidé d’aller à la présidentielle. La séquence Yalta sonne comme un tournant dans ce qui était jusque-là un documentaire sur une institution internationale. En Ukraine, au milieu du film, la présidentielle surgit, les langues se délient. C’est un moment public filmé, le meeting annuel de Yalta, fondé par l’oligarque Viktor Pintchouk et dont Euro RSCG s’occupe. Mais c’est aussi un moment intime. C’était déjà là, en juillet 2007, que DSK avait décidé, avec ses proches, de se lancer dans la course à la direction générale du FMI. Trois ans et demi plus tard, on sent qu’il a choisi de se lancer dans une autre course, celle de la présidentielle…

"Il faut dépasser le possible. Mais ne pas promettre l'impossible"

DSK plaisante avec Clinton, DSK présente son cercle le plus proche, son équipe: son ami avocat Gilles August, "monseigneur Fouks, un des plus grands cabinets mondiaux de conseil en communication" (patron d’Euro RSCG), Anne Hommel "qui travaille avec moi". DSK ajoute, badin: "Je fréquente de drôles de gens." Et ils parlent, comme on les a rarement entendus. DSK ose: "Je ne parle pas du présent de la France. En tant que citoyen, je m’intéresse à l’avenir de la France." Gilles August, le pote avocat, est plus explicite: "Il en parle, il a conscience de son destin. Ma conviction, c’est qu’à partir du moment où la France aura besoin de lui, il répondra présent." Son ami et conseiller Gilles Finchelstein se lâche: "Par son tempérament et ses compétences, il est, à ce moment précis, au cœur des attentes des Français." Est-il le candidat idéal? demande Nicolas Escoulan. "Oui, je le pense." Finalement, dans cette soirée ukrainienne, c’est Anne Sinclair qui en dit le moins… "Tous les choix de vie, on les a toujours faits à deux."
En janvier 2007, Nicolas Sarkozy s’était lancé dans la présidentielle avec son "j’ai changé". DSK lui répond comme en écho: "S’il y a un truc que je retiendrai de mon expérience au FMI, c’est que j’ai appris. Quand on a autour de 60 ans, on a l’impression qu’on n’apprend plus rien. Moi je suis retourné à l’école. J’ai appris." C’est un des buts de ce documentaire, donner à voir qu’il a changé, montrer ce qu’il fait au FMI, voir comment il vit, alors que les Français ne le voient plus. Et écouter l’homme politique qu’il fut et qu’il pourrait redevenir. Sa définition d’un homme de gauche, lui que certains désignent comme l’"affameur des peuples": "Ce n’est pas nier la réalité, c’est prendre la réalité et essayer de la corriger pour qu’elle soit plus juste. […] Il faut dépasser le possible. Mais ne pas promettre l’impossible." DSK évacue l’affaire Piroska d’un "je ne ferai pas de commentaire, si on veut qu’on respecte votre vie privée, il ne faut pas l’étaler", et dit d’Anne Sinclair qu’elle représente "tout, tout, l’équilibre, la joie de vivre, l’avenir".
Dans le film, DSK sourit, puis devient plus grave. Comme dans la dernière minute du film. On est le 15 janvier 2011, à Paris. DSK est dans son fauteuil blanc. "Quand annoncerez-vous votre décision?" interroge Nicolas Escoulan. "Je rencontre des gens dans la rue, ils m’arrêtent, je vois bien qu’il y a une attente. Cette décision, permettez-moi de la garder pour moi." Le favori des sondages a pris sa décision, contraint par le FMI ou se pliant au timing de ses camarades, il ne se dévoile pas. "Des calendriers ont été fixés, tous les gens qui sont susceptibles d’être candidats à gauche, au Parti socialiste en tout cas, auront à se prononcer à ce moment-là. Aujourd’hui, quoique je puisse avoir dans mon esprit, je le garde pour moi." Une fois vu le film de Nicolas Escoulan, le doute sur sa candidature paraît levé. DSK l’aura montré, il ne l’aura pas dit.

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