Laurent Gbagbo, qui s’accroche au pouvoir en Côte d’Ivoire malgré une nette défaite électorale – il a recueilli moins de 46 % des voix face à Alassane Ouattara – est de plus en plus isolé. Face à la pression internationale qui lui demande de quitter le pouvoir, l’intéressé dénonce un « complot du bloc occidental dirigé par la France », prêtant à Paris une influence perdue depuis belle lurette. On voit mal Nicolas Sarkozy dicter sa loi à Barack Obama ou à Ban Ki-Moon, le secrétaire général de l’Onu. Or, tous ont condamné l’inversion, par la Cour constitutionnelle ivoirienne dévouée à Gbagbo, des résultats proclamés par la commission électorale indépendante. Et que dire des désaveux qui émanent du Groupe des Sages de l’Union africaine et de la Communauté économique des États d’Afrique de l’Ouest (Cédéao) ? Difficile, ici, de parler de « complot occidental » : sur le continent noir, seul l’Angola s’est ouvertement rangé du côté du mauvais perdant.
Gbagbo fait assiéger son rival dans un hôtel d’Abidjan défendu par l’Onu, mais c’est lui, en réalité, qui est encerclé.
Toute la difficulté consiste à le déloger sans faire exploser le baril de poudre sur lequel il campe. L’option militaire serait un saut dans l’inconnu. La Cédéao peut-elle se lancer dans une guerre inter-africaine, comme elle parle de le faire ? Sans l’intervention de l’armée française, le conflit pourrait durer des années, et les représailles sur les nombreux immigrés burkinabés, béninois ou guinéens seraient terribles. Même les sanctions votées par l’Union européenne sont difficiles à mettre en place, car Gbagbo a des otages, avec les 14 000 ressortissants français qui travaillent en Côte d’Ivoire. Après avoir bloqué son avion personnel à Bâle-Mulhouse, le gouvernement français s’est bien gardé, hier, de parler de sanction. Il affirme avoir agi à la demande d’Alassane Ouattara, le président ivoirien « légitime » : le bras de fer reste diplomatique.
Pour combien de temps ? Maître de la partie riche de la Côte d’Ivoire, avec les plantations de cacao dont son pays est le premier producteur mondial, Gbagbo peut tenir des mois, voire des années. C’est une tumeur sur la terre africaine, qui n’en manque pas. L’Europe a eu la sienne, dans les Balkans, il n’y a pas si longtemps. La tumeur s’appelait Milosevic, et il avait fallu l’intervention de l’Otan pour en venir à bout.
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