TOUT EST DIT

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lundi 13 décembre 2010

Le monde face au toujours plus d'Etats

Dans les années 1990, la chute de l'URSS et l'implosion brutale de la Yougoslavie ont entraîné une multiplication spectaculaire du nombre des Etats. Il a fallu, lors des compétitions sportives, apprendre à distinguer de nouveaux drapeaux, à reconnaître de nouveaux hymnes. Serions-nous aujourd'hui à la veille d'une nouvelle vague de « fragmentation identitaire » ? Au début du mois de janvier 2011 doit se tenir au Sud-Soudan un référendum qui -s'il a bien lieu -devrait conduire à la naissance d'un nouvel Etat au sein du continent Africain. Les frontières des Etats de l'Afrique ont bien pu être dénoncées comme arbitraires et artificielles, elles ont sans doute contribué aux rivalités tribales, sinon aux « nettoyages ethniques », mais personne -et surtout pas les organisations panafricaines -ne souhaitait les voir remises en question. Plus l'équilibre était fragile et instable, plus le statu quo semblait impératif.


Une nouvelle boîte de Pandore est-elle sur le point de s'ouvrir en Afrique libérant des démons artificiellement contenus depuis trop longtemps ? N'est-ce pas le statu quo territorial lui-même qui, par ses artifices, constitue une des sources de la violence endémique qui explose comme une fatalité ?


Le comportement du régime de Khartoum a rendu cette évolution du Soudan vers la partition non seulement inévitable mais légitime. Cette division à venir du Soudan peut-elle servir de modèle et de précédent à d'autres fragmentations ? Au moment où en Côte d'Ivoire Laurent Gbagbo semble s'inspirer du modèle du président Robert Mugabe au Zimbabwe pour s'enraciner illégitimement au pouvoir, n'existe-t-il pas aussi un scénario possible d'éclatement du pays avec, là encore, une division Nord-Sud sur une base partiellement ethnique et religieuse, même si la réalité est infiniment plus complexe ?


Ce mouvement vers la « fragmentation identitaire » ne touche pas seulement le continent africain. Beaucoup plus près de nous en Europe, il concerne la Belgique bien sûr, qui semble accepter la paralysie absolue de son système politique comme le prix à payer pour le maintien de son unité. Mais il touche aussi l'Espagne, où un axe souverainiste remplace désormais l'axe de gauche -qui domina la Catalogne au cours des sept dernières années -depuis les élections au Parlement régional de novembre dernier. La crise économique touche toutes les parties de l'Espagne. Mais comme les tenants de la Ligue du Nord en Italie, des Catalans ombrageux opposent leur travail et leur réussite à la « paresse » des « Andalous ». Pourquoi devraient-ils travailler pour « eux » ? Les Allemands en nombre toujours plus grands ne parlent-ils pas du reste des Européens comme le font les Catalans des Espagnols ?


Certes, l'Europe n'est pas l'Afrique. En Afrique, c'est la violence et le désespoir qui sont les moteurs de la fragmentation identitaire. En Europe, si la violence existe, elle n'est heureusement -c'est une des conquêtes majeures de notre continent -que de nature économique. Mais la crise en durant sinon en s'approfondissant, donne naissance à des explosions de populismes et de nationalismes qui risquent de se traduire par une nouvelle vague de fragmentation.


L'Europe, qui a déjà beaucoup de mal à se gérer à 27 et qui traverse une grave crise d'identité, n'a pas tant besoin de nouveaux Etats que de nouvelles idées. On peut bien sûr rêver, comme le faisaient certains hier, d'une Europe des régions sur le modèle des cités -Etats de l'Italie de la Renaissance. C'est oublier qu'à l'heure de la mondialisation les nations apparaissent comme une protection identitaire, de même que à l'heure de la crise financière et économique, les Etats semblent plus forts que jamais face à un « marché » déstabilisé par ses excès mêmes.


Il est intéressant de noter que cette même quête identitaire qui pousse certains à la fragmentation se traduit pour d'autres par la renaissance de rêves néo-impériaux. Ces deux mouvements vers le « plus petit » ou vers le « plus grand » appartiennent à la même logique identitaire. La référence naturelle n'est-elle pas dans le cas de la Turquie l'Empire ottoman et dans celui de la Russie l'Empire ?


Vers le « plus petit » ou vers le plus « grand » le monde serait-il à la veille d'une nouvelle recomposition ?

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