Alors que le remaniement ministériel ne devrait pas survenir avant la mi-novembre, François Fillon et Jean-Louis Borloo sont aujourd’hui les prétendants à Matignon les plus crédibles.
La succession de François Fillon à Matignon, attendue après le G20 des 11 et 12 novembre à Séoul (Corée du Sud), n’en finit plus d’échauffer les esprits. Alors que le secrétaire général de l’Elysée, Claude Guéant, a affirmé il y a dix jours que Nicolas Sarkozy « n’a pas encore fait son choix », deux prétendants font la course seuls en tête : Fillon et le ministre de l’Ecologie, Jean-Louis Borloo. A défaut d’être arbitrée, la compétition est ouvertement commentée dans les rangs politiques.
« Je trouve que la politique suivie par Fillon n’est pas la bonne sur beaucoup de sujets, mais que lui est honorable dans sa fonction », a estimé François Bayrou, hier sur Europe 1 ( qui est ce sinistre abruti pour dire des trucs pareils ?), avant de critiquer en creux Jean-Louis Borloo : « La fonction de Premier ministre exige une solidité, une stabilité », a asséné le président du Modem. Un argumentaire également développé à gauche, où l’on se gausse de l’expérience du ministre d’Etat. « Borloo a fait quoi ?, feint de s’interroger Laurent Fabius. Il s’est occupé de la ville… au moment des émeutes de 2005, c’est ça ? Il a été trois semaines ministre de l’Economie et des Finances, le temps pour lui de dire qu’il était pour la TVA sociale. Et, enfin, il s’occupe des transports, de l’essence… et de l’écologie, au point que le président de la République vient de dire : “l’écologie, ça suffit !” »
51 % des Français votent Fillon
Invité de Canal+ hier, Borloo s’est moqué de ses détracteurs. « J’ai l’impression de revoir le même film, pointe-t-il en allusion à son ascension à Valenciennes puis au gouvernement. Tout d’un coup, je deviens brouillon, je suis mal coiffé ou trop bien coiffé, ou je n’ai pas la tête de l’emploi… » Le président du Parti radical a soigné son image sociale, estimant que cela pouvait correspondre à un « besoin ». « Ce que j’ai entendu de la rue, c’est que plus il y a de crise, plus il y a besoin de justice. De justice sociale, de justice fiscale et de respect », a-t-il dit.
Au sein du gouvernement, l’hypothèse Borloo gagne du terrain. Patrick Devedjian (Relance) estime que « l’annonce précoce d’un remaniement important a créé une attente qui rend la désignation d’un nouveau locataire à Matignon presque inévitable ». Marc-Philippe Daubresse (Jeunesse), proche de Borloo, développe : « Il nous faut un animateur, quelqu’un qui va incarner ce qui est la suite du film. » Mais les Français, qui plébiscitent le ministre de l’Ecologie dans le cas où la succession à Matignon est ouverte (30 %), lui préfèrent encore François Fillon : 51 % d’entre eux sont favorables à son maintien au poste de Premier ministre, d’après un sondage BVA publié jeudi.
Nicolas Sarkozy, lui, ne semble pas pressé de trancher. « Il ne faut pas confondre vitesse et précipitation, a-t-il déclaré vendredi, après la septième journée de manifestations. Il faut prendre le temps de réfléchir sereinement, calmement, profondément. »
Son profil
Titulaire d’un DEA de droit public, cet amateur de courses automobiles et d’alpinisme adhère au RPR en 1977. Elu député de la Sarthe en 1981, il rencontre Philippe Séguin, qui devient son mentor en politique. Gaulliste social, nommé ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche en 1993, il fait campagne pour Edouard Balladur contre Jacques Chirac en 1995. Ce dernier l’enrôle toutefois dans le gouvernement Juppé, où il est en charge des Technologies de l’information et de la Poste. En 2002, il devient ministre des Affaires sociales, du Travail et de la Solidarité avant d’œuvrer, deux ans plus tard, à l’Education nationale, à l’Enseignement supérieur et à la Recherche. En 2007, après avoir conseillé Nicolas Sarkozy pendant sa campagne présidentielle, il est nommé à Matignon.
Son style
Sobre, presque austère, il s’efface volontiers derrière le chef de l’Etat, privilégiant la discrétion. Sa communication est cadrée, contrôlée, mais rarement langue de bois.
Ses atouts
L’adoption de la réforme des retraites
Sa proximité avec les parlementaires
Sa capacité à rassembler la droite
Sa loyauté envers le président de la République
Ses handicaps
Sa longévité à Matignon
L’érosion de sa popularité
L’annonce d’un « grand » remaniement
Sa fidèle au gouvernement
Roselyne Bachelot, ministre de la Santé et des Sports
Ce qu’en dit l’Elysée
« Le Président a l’habitude de travailler avec lui. Il est fidèle, populaire et a une très bonne relation avec le Parlement. » (Claude Guéant)
Son profil
Brillant avocat, il s’est fait connaître du grand public en gérant les affaires de Bernard Tapie dans les années 1980. Devenu président du club de football de Valenciennes, il fait ses premiers pas en politique avec un premier mandat de maire de la ville en 1989. Cofondateur de Génération Ecologie, il est élu député en 1993. Ce centriste entre au gouvernement en 2002, sous la présidence de Jacques Chirac, qui le nomme ministre de la Ville puis ministre de l’Emploi. Nicolas Sarkozy lui confie en 2007 la charge de l’Economie, des Finances et de l’Emploi, un poste qu’il doit quitter un mois plus tard, après les élections législatives, à cause d’une gaffe sur la TVA sociale. Il devient alors ministre d’Etat délégué à l’Ecologie.
Son style
Flamboyant, il a le verbe haut et le geste fort, rodés dans les prétoires d’avocat. Sa communication dérape parfois.
Ses atouts
Son étiquette centriste : il est président du Parti radical
Sa relation de confiance avec les syndicats
Sa capacité à incarner le virage social souhaité par l’Elysée
Sa popularité croissante
Ses handicaps
Son « retard à l’allumage » dans la gestion de la crise du carburant
Son franc-parler
La défiance des parlementaires
Ses fidèles au gouvernement
Marc-Philippe Daubresse, ministre de la Jeunesse et des Solidarités actives, et Valérie Létard, secrétaire d’Etat aux Technologies vertes et Négociations sur le climat
Ce qu’en dit l’Elysée
« C’est un orfèvre en matière sociale et il a l’oreille des syndicats. » (Claude Guéant)
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