TOUT EST DIT

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vendredi 10 septembre 2010

L'Europe contre le
« c'est légal »


Ça ne va pas arranger les affaires de l'Europe. En tout cas, pour les Français qui la trouvent déjà trop envahissante et n'apprécieront pas l'épisode d'hier. L'espèce de droit d'ingérence que le parlement de Strasbourg s'est octroyé pour exhorter Paris à suspendre ses expulsions de Roms a toutes les chances d'apparaître à leurs yeux comme une offensive de sensiblerie défiant le droit.
La réaction outragée d'Éric Besson depuis Bucarest est significative d'une exaspération officielle à l'endroit de l'institution communautaire, et de ce qu'elle représente. Sûres d'elles, les autorités françaises ont beau jeu d'invoquer le « c'est légal » pour justifier des mesures validées par des décisions de justice. Dont acte.
Le problème, c'est que la protestation votée, à une confortable majorité, par les députés européens vise autant, sinon plus, le discours, la méthode et la médiatisation des reconduites à la frontière que leur légitimité juridique. Elles sont de même nature, au fond, que les réprimandes exprimées par le pape Benoît XVI, ou que les inquiétudes manifestées à Londres ou à Washington pendant l'été. Sans pouvoir coercitif, elles se placent dans le registre de la défense de valeurs communes, et s'y cantonnent. Dans cette dimension, on peut considérer que le parlement européen est resté dans son rôle.
Le gouvernement français lui a répondu par un bras d'honneur plus ou moins poli. Il peut évidemment passer outre ces recommandations -rien ne l'oblige à les suivre- mais il ne peut pas être insensible aux mises en cause qui s'accumulent. Les ministres en sont réduits à pointer du doigt les caricatures de la presse hexagonale qui auraient influencé les élus européens... Ce n'est pas sérieux.
L'explication est un peu courte quand même, même si on ne peut que regretter les références abusives et autres délires déplacés qui ont imprudemment catalogué la politique française dans la galerie d'horreurs d'un autre temps. Plus probablement, le gouvernement est piégé par une communication qu'il a voulu tapageuse et ouvertement dénonciatrice parce qu'il en attendait des dividendes dans les sondages. Il a fait tellement de bruit avec ces expulsions, vantant les chiffres et montrant ses muscles qu'il a fini par réveiller, chez ses voisins européens, une gêne, puis une réelle inquiétude.
Le « c'est légal » aurait dû être une arme politique de sécurité. Manifestement, elle voyage mal au-delà des frontières quand c'est « le pays des droits de l'homme » qui la véhicule.

Olivier Picard

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