TOUT EST DIT

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mardi 8 juin 2010


L'argent en justice

En France, s’ouvre le procès de Jérôme Kerviel, accusé d’avoir fait perdre à la Société générale, en 2008, 4,9 milliards d’euros. Les débats devront déterminer les culpa bilités : s’agit-il de la fraude d’un individu, d’un défaut de vigilance de ceux qui devaient contrôler ses activés ou des dérives inévitables d’un système dévoyé ? Pendant ce temps, David Cameron, en Grande-Bretagne, annonce à ses concitoyens qu’ils devront pendant plusieurs années changer leur mode de vie. En Allemagne, on prépare un budget très rigoureux – non sans mal, comme le souligne le report surprise de la rencontre entre Angela Merkel et Nicolas Sarkozy. Et l’euro faiblit encore, à la suite d’informations alarmantes venues de Hongrie.

L’affaire Kerviel symbolise le vent de folie qui s’est emparé de la planète financière et a provoqué les bourrasques qui secouent encore l’économie mondiale. Quand en effet sont mises en relation les prises de risques insensées dans le monde de la finance (dont l’affaire des subprimes aux États-Unis a révélé l’ampleur) et leurs conséquences, notamment la montée du chômage dans de nombreux pays occidentaux, la tentation est grande de clouer au pilori la race des « banquiers » qui, avec les « patrons », sont des cibles évidentes de la colère et des inquiétudes pour ceux qui paient les pots cassés. Les juges devront donc veiller à bien limiter le champ du procès, et les commentateurs à bien distinguer entre les différentes activités des établissements bancaires, tous leurs salariés n’étant pas des « traders ».

Ce devrait être, aussi, le procès de l’arrogance : celle qu’ont pu afficher certains professionnels, cultivant une forme d’extraterritorialité « justifiée » par la hauteur des bénéfices escomptés, parce qu’ils faisaient gagner à leur banque de sommes énormes, d’autant plus imposantes que les risques (pour qui ?) étaient élevés. Sans résonance avec le monde réel de tous ces gens pour qui 4,9 milliards d’euros, cela ne veut rien dire ! Ce sera le procès d’une fascination malsaine pour l’argent, un argent immatériel, volatil, sans valeur associée… sauf quand il vient à se dérober. Et ce que l’on voudra vraiment savoir, à l’issue des audiences, c’est si les choses ont vraiment changé dans les salles de marché.

Dominique Quinio

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