mercredi 5 février 2014
Valérie Trierweiler partie, un boulevard pour Ségolène Royal?
Elle oscille entre liberté critique et devoir minimal de solidarité
Il y a longtemps pourtant qu'entre le président et son ex-compagne la guerre est terminée. Rien n'est simple, mais tout est moins compliqué. Au-delà de l'affection privée, il y a la complicité politique, la même volonté d'accomplir un destin, un langage commun. Hollande sait l'enfer que Royal a traversé après sa débâcle à l'élection législative de juin 2012, le repli, la certitude absolue d'être finie.
"Ce qui m'a rendu vraiment triste, ce n'est pas le tweet, c'est l'échec de Ségolène", confie le chef de l'Etat à Cécile Amar dans Jusqu'ici tout va mal (Grasset), à propos du soutien public apporté par Valérie Trierweiler à l'adversaire de son ancienne rivale."Paradoxalement, cet événement les a rapprochés, note un élu proche de la présidente de la région Poitou-Charentes. Hollande était sincèrement touché par la détresse de Royal."
Après l'accession de son ancien compagnon à la tête de l'Etat, l'ex-candidate à l'élection présidentielle, perchée sur une ligne de crête, veut osciller entre liberté critique et devoir minimal de solidarité. Finalement, c'est surtout la critique qui l'emporte : certes, Royal soutient la fermeté du gouvernement dans l'affaire Leonarda à l'automne 2013, comme elle a salué, un an plus tôt dans Le Monde, "les bonnes décisions d'urgence et les mesures courageuses pour réduire les déficits".
Mais, dès cette époque, elle invite l'exécutif à accélérer les réformes ; en mai 2013, dans Le Monde encore, elle fustige "le temps perdu [...], l'inertie depuis un an", puis dénonce la méthode du Premier ministre lors de l'adoption de la loi sur le mariage pour tous ; en juillet, elle s'oppose à la contribution climat énergie proposée par le ministre de l'Ecologie, Philippe Martin; en novembre, elle se montre hostile au projet de loi de lutte contre la prostitution. Bref, Ségolène Royal ne se laisse pas oublier, même si elle reste ostracisée à l'Elysée : pas question qu'elle y mette les pieds, son ancienne rivale en fait une affaire personnelle.
A Paris, elle visite l'exposition dédiée au photographe Raymond Depardon et la rétrospective Félix Vallotton ; elle assiste à un concert de la chanteuse Joyce Jonathan, qui partage la vie de son fils Thomas ; elle participe à des dîners, qu'elle organise parfois chez elle, ou qui réunissent ses amis chez les ministres qui la soutiennent, Dominique Bertinotti, Guillaume Garot. Elle reçoit même une invitation qui la surprend, mais qu'elle refuse immédiatement : celle de Valérie Trierweiler, qui l'a conviée, le 8 janvier, à la projection du film consacré à Yves Saint Laurent au palais de Chaillot.
En tout petit comité, elle assiste à la remise de décoration de son vieil ami Jean-Luc Fulachier, directeur des services à la région PoitouCharentes, au ministère de Marylise Lebranchu, aubryste convaincue. Elles ont été de farouches adversaires, mais, ce jour-là, l'atmosphère est chaleureuse, les discours sont amicaux. En politique aussi, les pages se tournent.
"Ségolène est libérée de son chagrin, allégée du poids des souffrances passées. Elle va bien", résume un proche. Pour autant, même si le départ de Valérie Trierweiler a levé le verrou qui bloquait la première porte, peut-elle entrer au gouvernement ?
En novembre, invitée de Canal +, Royal assure qu'elle sera prête, "le moment venu". Ses proches invoquent son parcours, les valeurs qu'elle incarne, la voix qu'elle porte le dernier baromètre BVA-L'Express fait d'elle la 9e personnalité politique préférée des Français, la seule socialiste à gagner encore des points dans l'opinion.
Ses détracteurs, eux, pointent son individualisme, son appétit de médias, sa trop grande liberté de ton : en janvier, elle dénonce encore l'accumulation des hausses d'impôts, après avoir souligné les dangers de la réforme territoriale ; au début de février, en pleine polémique sur la "théorie du genre", elle se démarque du gouvernement via Twitter.
Ses adversaires redoutent enfin le risque d'une interférence entre vie publique et sphère intime Ségolène Royal est la mère des quatre enfants du président. "C'est une dirigeante d'un très haut niveau, rétorque son ami l'avocat Jean-Pierre Mignard. Si la question privée devait l'empêcher d'accéder à une responsabilité, ce serait une erreur et une injustice terrible."
"Le bonheur, c'est de continuer à désirer ce que l'on possède", affirmait Ségolène Royal, le 12 janvier, citant saint-Augustin sur le plateau de Laurent Delahousse (France 2). Ce jour-là, quarante-huit heures après le scoop de Closer, la présidente de région ne pensait sûrement pas à elle. Car, à titre personnel, elle a tant de choses à désirer qu'elle ne possède pas encore...
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