TOUT EST DIT

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jeudi 29 août 2013

Réforme des retraites : beaucoup de bruit pour rien !

Philippe Tesson dénonce le rafistolage proposé par Ayrault et fustige la méthode socialiste : grandiloquence du discours, insignifiance de l'action.


Il n'y a que des mécontents. Mais c'est normal : la réforme des retraites n'est un cadeau pour personne, chacun va devoir y aller de sa contribution financière. Alors on se dit : dans ces conditions et puisqu'il s'agit d'une décision impopulaire, pourquoi les socialistes n'y sont-ils pas allés plus fort ? Ils disent qu'ils construisent laFrance de demain, et au bout du compte, s'agissant d'un dossier aussi important, tout ce qu'ils trouvent à nous proposer, c'est ce moignon qui s'inscrit dans une vision purement comptable du problème.
Jean-Marc Ayrault affirme que sa réforme est structurelle et qu'elle assure l'avenir de nos régimes de retraite. C'est un leurre. Elle est fondée sur une analyse prospective, donc théorique, qui ne tient pas compte de l'évolution économique des années à venir. Tout peut arriver qui remette en cause à tout instant une prévision aléatoire. On veut bien comprendre que, par définition, une réforme des retraites s'inscrive dans la longue durée, mais le calendrier à terme de 2035 fixé par le gouvernement, relatif à la durée de cotisation, paraît bien problématique. Quant à l'immédiat, ce qu'on retiendra, c'est la décision d'une hausse des prélèvements, ce qui n'a vraiment rien de structurel. 

Une occasion manquée

Bref, ils n'ont pas tranché dans le vif. Tous les problèmes réellement structurels sont éludés : le montant des pensions, les régimes spéciaux, celui des fonctionnaires, l'âge légal, etc. Et s'agissant du financement, ils vont au plus facile : on taxe, et l'on taxe en priorité les entreprises - en ajoutant à leurs charges le financement de la prise en compte de la pénibilité - en échange d'une vague promesse d'une baisse du coût du travail. Voilà ce que Jean-Marc Ayrault appelle "une réforme responsable". C'est plutôt une "victoire du syndicalisme combatif", selon les termes du secrétaire général de la CFDT, principal bénéficiaire de l'opération. François Hollande et son gouvernement ont manqué l'occasion de faire la preuve de leur résolution réformatrice à l'heure où le président de la République est l'objet de nouvelles mises en garde, la plus récente venant du commissaire européen chargé des Affaires économiques.
La fermeté de Hollande, elle ne s'exerce que sur des sujets à moindre risque, relativement indifférents à l'opinion, des sujets à forte valeur ajoutée théâtrale. Il est bon sur ce terrain-là. Partir en guerre contre Bachar el-Assad, c'est pour l'essentiel de la posture. Cela ne coûte ni beaucoup d'argent ni beaucoup de voix électorales. Les retraites, c'est autre chose.

Le virus de l'utopie

On lit désormais très clairement dans la stratégie et la méthode du président. Le discours de la réforme est très au point et très ambitieux. Écoutez-le : ce n'est pas d'une mince réforme qu'il s'agit et elle va demander du temps. Suivez mon regard : il va bien falloir deux quinquennats. Objectif : préparer la France de 2025. Martine Aubry, mardi dans Le Monde, apportait sa contribution à la définition du rêve : "Vers une nouvelle renaissance", écrit-elle, ajoutant : "Nous avons la responsabilité de faire émerger un autre monde." L'incorrigible virus de l'utopie socialiste, au mépris de la réalité, en dépit de l'expérience et comme si le reste du monde n'existait pas ! Elle nous livre un excellent plaidoyer, touchant, adolescent, un chant d'espoir où pas un instant il n'est question des conditions propres à réaliser cet espoir et de son coût et de sa faisabilité. Elle qui a prétention à gouverner, et qui l'a fait ! 
Elle dit encore : "L'heure n'est plus au rafistolage." Or, que voit-on ? La réforme des retraites n'est-elle pas purement et simplement un rafistolage ? Une parole grandiloquente, emphatique, et animée sans doute d'intentions sincères lorsqu'elle est prononcée. Et dans l'action : l'à-peu-près, la faiblesse, la peur, l'insignifiance. Ainsi sont-ils faits.

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