jeudi 11 avril 2013
Reprendre la main
Reprendre la main
À quelque chose scandale est bon : l'affaire Cahuzac offre à François
Hollande l'opportunité d'un coup de torchon comme on n'en a pas connu
depuis les lois sur le financement des partis dans les années 1990. Sa
réussite serait un élément clé, bien qu'insuffisant, du retour de la
confiance.
L'originalité du dispositif, qui deviendra projet de loi dans quinze
jours, tient au fait qu'il prend le problème par tous les bouts. Il
contraint les élus à la transparence. Il renforce les sanctions. Il
tente de briser le lien entre l'intérêt général - qu'est censé défendre
un élu - et l'intérêt particulier lié à sa profession. Il vise à
combattre les causes internationales de la fraude.
D'une certaine manière, même si c'est contre son gré, le président de
la République renoue avec le thème de l'argent fou que le candidat
Hollande dénonçait dans son discours du Bourget et qui lui a été renvoyé
comme un boomerang depuis les aveux de l'ex-ministre du Budget.
S'il parvient à manoeuvrer habilement, il peut même mettre
l'opposition dans l'embarras, elle qui n'est pas exempte de conflits
d'intérêts ou qui, la semaine dernière encore, déposait une proposition
de loi visant à amnistier les fraudeurs au fisc qui rapatrieraient leurs
capitaux. On comprend, sans les excuser, les insultes entre l'UMP et le
gouvernement, cette semaine à l'Assemblée.
Cette opération mains propres se heurte cependant à plusieurs
obstacles. D'abord, la France seule n'a pas la capacité d'imposer des
règles nouvelles ni aux pays européens ni aux paradis fiscaux. Elle
n'empêcherait pas Jérôme Cahuzac de mentir, ni de frauder.
Deuxièmement, la notion de conflit d'intérêts est délicate à
définir : tout élu - avocat, agriculteur, artisan, journaliste... - ne
devrait-il pas, au risque de voir l'oeuvre de sa vie fondre sous le
soleil de la transparence, mettre ses affaires entre parenthèses ?
Enfin, si la surveillance de l'enrichissement doit être implacable,
la transparence totale du patrimoine ouvre une boîte de Pandore dont le
contenu peut être plus redoutable pour l'image de la politique que le
mal qu'il prétend soigner. Pas plus que la richesse n'est synonyme de
délinquance, la pauvreté ne suffit pas à garantir la vertu ou la
compétence !
Le gouvernement et le Parlement ont donc du travail pour affiner un
dispositif de nature à relégitimer une classe politique globalement
victime de l'affaire Cahuzac.
Mais si les Français attendent de leurs élus des moeurs exemplaires,
ils espèrent aussi que cette exemplarité porte sur le respect des
promesses. Sans résultats sur la croissance, le chômage, le pouvoir
d'achat et l'insécurité, l'exécutif restera faible.
Et cette faiblesse, parce qu'elle mine l'autorité, peut avoir de
lourdes conséquences. En brisant le tabou de la rigueur et en doutant de
jours meilleurs, Arnaud Montebourg, Cécile Duflot et Benoît Hamon
valident indirectement la radicalité de Jean-Luc Mélenchon, malmènent la
solidarité gouvernementale et risquent de compromettre la tentative de
François Hollande de se refaire.
Sauf à prendre le risque d'une sanction immédiate et catastrophique à
travers nos taux d'intérêts, il ne peut y avoir d'inflexion qui ne soit
pas collective en Europe.
La transparence de la vie politique n'est vraiment qu'un des leviers pour reprendre la main.
Michel Urvoy
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