lundi 25 mars 2013
Chypre, un iceberg en Méditerranée
Chypre, un iceberg en Méditerranée
Le danger n'est pas toujours là où on croit. À force de sueurs froides grecques et de frayeurs hispaniques, on avait fini par apprivoiser la bête. Par s'accoutumer à la présence chronique de la crise de l'euro. Présentée comme mortelle à tout moment et, en fait, jamais fatale. Mario Draghi, le patron de la Banque centrale européenne, avait, disait-on, fait le nécessaire, l'été dernier. En lançant un « circulez, y'a rien à voir » à ceux qui misaient encore sur le naufrage du navire Euro.
Et puis, dans les brumes d'un printemps qui tarde à venir, voilà surgir le casse-tête chypriote. Comme un iceberg en plein milieu de la Méditerranée. Un concentré de crise ramassé sur une île. Sur-financiarisée, comme l'Irlande. Sous-gouvernée, comme la Grèce. Surendettée, comme tout le monde.
Avec en prime trois particularités. Chypre est une île toujours divisée en deux depuis l'invasion turque de 1974. Un événement qui a eu pour effet de l'arrimer, en fait, davantage à l'Union européenne qu'il n'était dans ses traditions.
Par sa position géographique, au balcon d'un Proche-Orient en pleine déstabilisation, Chypre est partie prenante d'une dimension stratégique que la récente découverte d'importantes réserves de gaz ne fait que renforcer.
Enfin, ses liens historiques et financiers avec Athènes et Moscou ne simplifient pas le tableau. Les premiers ont répercuté sans amortisseurs les déboires des banques grecques sur les banques chypriotes. Les seconds ont donné l'illusion qu'une « économie de casino », pour reprendre les termes utilisés par Pierre Moscovici, pouvait passer inaperçue en pleine tempête de l'euro.
Signaux à corriger
Avec un million d'habitants, 0,2 % du PIB de la zone euro, ce petit pays aurait pu rester un cas très particulier, si les dirigeants de la BCE, du FMI et de l'Union européenne n'avaient pas, la semaine dernière, franchi un seuil symbolique.
En donnant leur aval à un plan de taxation généralisée des dépôts bancaires, ils ont provoqué un court-circuit. Annihilant, d'une certaine manière, les progrès pourtant réels accomplis depuis deux ans.
Tout y est. L'opacité des prises de décision. Le renvoi de responsabilité sur Berlin, la Commission, la BCE et le FMI. L'électrochoc pour les petits épargnants comme les gros investisseurs.
Ce sont ces signaux qu'il faut absolument corriger, que Chypre quitte ou non le navire, qu'un plan B ait ou non du succès. Pour éviter l'infarctus de la zone euro. Pour conjurer le fossé Nord-Sud de plus en plus profond en Europe. Pour impliquer des opinions publiques saturées d'explications complexes pour un résultat si élémentaire : au final, l'addition leur revient.
Les dimensions sociales et politiques de la crise en cours sont déjà patentes. Elle exige donc des réponses sociales et politiques. Deux dimensions restées jusqu'ici atrophiées dans la construction européenne. Pas de réponse sociale sans un vrai budget de l'UE, pas de réponse politique sans un vrai projet. Le défi est colossal, mais incontournable. Surtout à un an des élections européennes. Car si personne ne porte ces réponses à leur juste échelon, celui de l'Union, les sentences toutes trouvées des casseurs de l'Europe sont déjà prêtes. Simples. Simplistes même. Mais terriblement proches d'un sentiment qui se propage. L'exaspération.
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