TOUT EST DIT

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lundi 17 septembre 2012

Vingt ans après Maastricht, les Français doutent toujours

 Selon notre sondage Ifop, les Français voteraient non aujourd'hui au traité instaurant la monnaie unique.

Mauvaise nouvelle pour Bruxelles - et pour François Hollande. Vingt ans après Maastricht, le référendum qui avait tant divisé les Français serait perdu s'il avait lieu aujourd'hui. C'est l'un des grands enseignements du sondage Ifop pour Le Figaro. Le 20 septembre 1992, les Français avaient ratifié d'extrême justesse le traité européen, avec 51 % des voix contre 49 %. Ceux qui ont voté à l'époque - qui sont donc nés avant 1974 - choisiraient le non à 64 %. Et ils sont désormais 67 % à dire que l'Union européenne va «plutôt dans la mauvaise direction» depuis la ratification de Maastricht. En 1999, ils étaient 53 % à estimer qu'elle allait «plutôt dans la bonne direction». La plupart des réponses confirment ce rejet grandissant à l'égard du projet fédéral européen. Au moment où la question d'un pas supplémentaire vers l'interdépendance paraît s'imposer, à la demande d'Angela Merkel mais surtout pour confirmer les engagements pris par la Banque centrale européenne, la France paraît s'installer durablement dans une attitude eurosceptique. Les Français ne semblent plus croire en l'intégration européenne, qu'on leur avait présentée comme le bouclier qui les protégerait des vents du large.

Le clivage révélé par le référendum de 2005 s'est durci 
En premier lieu, c'est l'euro, créé par le traité de Maastricht, qui est dans le collimateur des Français. «La monnaie unique est un très mauvais agent recruteur pour l'Europe, surtout dans les classes populaires», constate Jérôme Fourquet, directeur du département opinion de l'Ifop. Quarante-cinq pour cent des sondés pensent que l'euro a été un handicap face à la crise. Ils n'étaient que 34 % à le penser en août 2010. Ouvriers et professions intermédiaires sont les plus opposés à l'euro. Mais la France active dans son ensemble porte aussi un jugement très négatif sur la décision la plus audacieuse d'union monétaire de l'histoire économique du XXe siècle. Les femmes sont plus sévères: 50 % y voient un handicap, contre 41 % pour les hommes. Les plus de 65 ans sont plus cléments: 41 % considèrent que c'est un atout, 30 % un handicap.
Pis, les Français jugent que le passage à l'euro a eu des conséquences négatives sur la compétitivité de l'économie (61 %), le chômage (63 %) et le niveau des prix (89 %). Le camp de ceux qui souhaitent majoritairement moins d'intégration a progressé de 12 points, à 60 %. Et ils sont 64 % à juger «peu probable» l'émergence d'un «État européen unique». Le clivage révélé par le référendum de 2005 sur le traité constitutionnel européen s'est donc durci: les deux France, celle des cadres supérieurs et celle des classes populaires, se regardent en chiens de faïence. Pour Jérôme Fourquet, «la France est vraiment coupée en deux. La crise de 2008 a accentué les fractures à l'intérieur de la société française».
» La valeur en euros des francs (Le Particulier)

Les Français ne veulent donc pas d'un rétropédalage
C'est une tendance de fond et un enjeu de longue durée pour les hommes politiques. Dans les semaines qui viennent, cela place aussi François Hollande dans une situation inconfortable, au moment où il doit faire ratifier le traité européen sur la zone euro, signé par son prédécesseur Nicolas Sarkozy en mars 2012. Hollande, déjà traumatisé par le référendum de 2005 qui avait failli avoir raison de l'unité du Parti socialiste, se retrouve de nouveau face à l'impopularité de l'Europe, notamment dans son propre camp. Les électeurs de droite sont en effet plus proeuropéens que ceux du PS: 39 % des électeurs de Sarkozy pensent que l'euro a été un atout face à la crise, 24 % seulement au PS. Certes, les Français ne sont pas à un paradoxe près, et ils ne jettent pas tout par-dessus bord. Ils restent favorables au principe d'une union politique européenne: 47 %, contre 27 %, jugent qu'il est dans l'intérêt du pays de rester associé à l'ensemble politique européen. Le projet souverainiste d'un retour à la France d'avant le traité de Rome n'est pas jugé crédible. Les sondés restent lucides sur le coût d'un retour au franc: 65 % rejettent cette perspective, contre 35 %. Mais le camp des partisans du franc a fait en trois mois un bond de 9 %: en juin, ils étaient 26 %. Historiquement, ce n'est pas le point le plus haut: ils étaient 38 %, en mai 2010. Mais bien plus que les 18,3 % de Marine Le Pen à la présidentielle.
Les Français ne veulent donc pas d'un rétropédalage, mais encore moins d'une accélération ou d'un élargissement. «L'opinion est mûre pour une déflagration qui profiterait aux partis protestataires, mais l'agenda politique ne leur donnera pas l'occasion d'en profiter. En profondeur, nous dansons sur un volcan», conclut Jérôme Fourquet.

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