Le 26 juin, les députés élisent le
président de l’Assemblée Nationale. Au PS, la course au perchoir a déjà
commencé. Ségolène Royal et Jack Lang éliminés, Claude Bartolone, Jean
Glavany ou encore Elisabeth Guigou sont en lice. Course au pouvoir ou
juste à la planque ?
Comment expliquer que le poste de Président de l'Assemblée soit si convoité ?
Didier Maus
: Il s'agit d'un très haut poste de la vie constitutionnelle de la
République. Le président de l'Assemblée nationale est non seulement le
4e personnage de l'Etat par son rang protocolaire, mais surtout le
président de l'assemblée qui représente la volonté générale du peuple
français, majorité et opposition confondues. Il ne s'agit pas
véritablement d'un poste de responsabilité politique de premier plan, à
la différence du Premier ministre et des membres du Gouvernement, mais
le président de l'Assemblée joue un rôle essentiel dans la circulation
de l'accord politique entre le Président de la République, le Premier
ministre et la majorité parlementaire qui les soutient.
Il y a également un véritable prestige attaché à la fonction,
par exemple en recevant les chefs d'Etat étrangers en visite d'Etat ou
en mettant ses moyens à la disposition de grandes causes culturelles ou
humanitaires en faveur des Droits de l'homme.
Il est très difficile de dresser un profil type du président de l'Assemblée nationale. Certains
sont élus en raison de leurs fonctions antérieures (Jacques
Chaban-Delmas en 1958, 1978 et 1986 ou Laurent Fabius en 1988 et 1997),
d'autres en raison de leur positionnement politique et de leur fidélité à
la majorité (Philippe Séguin en 1993, Raymond Forni en 2000, Jean-Louis
Debré en 2002, Bernard Accoyer en 2007).
Compte tenu du profil des candidats passés, qui est favori ?
Impossible de répondre à cette question. Il
y a des facteurs politiques, des facteurs personnels à l'intérieur du
groupe socialiste et des nécessairement des contacts discrets avec le
Président de la République et le Premier ministre.
Quels sont les avantages liés à la fonction ?
Le président de l'Assemblée nationale bénéficie d'une indemnité fonction particulière. J'en ignore le montant.
Il y a surtout la chance (le privilège?) de pouvoir travailler, recevoir et, si nécessaire, habiter à l'Hôtel de Lassay,
résidence officielle du président. Il s'agit d'un superbe hôtel du
XVIIIe siècle, avec de magnifiques salons de réception, un agréable
petit jardin et une vue imprenable sur la Seine. Le président de
l'Assemblée nationale dispose d'une des très belles résidences des
autorités publiques, du même niveau que le Palais de l'Elysée, l'Hôtel
de Matignon pour le Premier ministre ou le Petit Luxembourg pour le
président du Sénat. Les présidents de l'Assemblée nationale ont toujours
pris soin de bien entretenir les bâtiments, de les moderniser et d'y
faire les travaux de restauration découlant de leur caractère
historique. Il ne fait aucun doute que cet hôtel et sa grande galerie,
qui le relie au Palais Bourbon, lieu de travail de l'Assemblée
nationale, symbolise parfaitement un certain art de vivre à la
française.
Comment ce rôle a-t-il évolué ?
Le président de l'Assemblée nationale dispose d'abord de prérogatives constitutionnelles
(il est consulté sur la dissolution ou la mise en oeuvre de l'article
16 sur les pouvoirs exceptionnels; il nomme 3 membres du Conseil
constitutionnel et peut le saisir). Il fait partie des
institutions de la République. Il bénéficie également de très nombreux
pouvoirs en tant que premier responsable de l'Assemblée nationale.
Le plus visible est la présidence des séances importantes ou
solennelles, mais sa connaissance des procédures parlementaires, son
sens du dialogue et du bon sens sans oublier, parfois, une véritable
autorité confèrent à sa fonction une véritable originalité. Il
est un membre de la majorité, mais doit faire en sorte que l'opposition
ou les groupes minoritaires trouvent leur place légitime à l'intérieur
du débat politique. Il est, ainsi, de tradition que le
président de l'Assemblée ne participe aux scrutins sauf pour la
responsabilité politique du Gouvernement en début de législature ou dans
des occasions très fortes. Lorsqu'il souhaite s'exprimer en tant que
député, ce qui est rare, il quitte le "perchoir" et prend la parole soit
de son banc, soit à la tribune comme ses 576 collègues.
Son rôle concret, souvent discret, dépend
largement des circonstances politiques, de sa personnalité et de celles
des autres responsables de la majorité, par exemple le président du groupe majoritaire. Il est en tout cas plus un relais qu'un inspirateur.
Le
Président de l'Assemblée peut, depuis la réforme constitutionnelle de
2008, soumettre une proposition de loi à l’avis du Conseil d'État ou
demander la réunion d’une commission mixte paritaire dans le cas d’une
proposition de loi. Ce pouvoir législatif est-il exercé dans les faits ?
Même question pour les prérogatives constitutionnelles (nommer 3
membres CC, 2 membres CSM).
La demande d'avis du
Conseil d'Etat a fonctionné (environ 5 cas). Pour la convocation des CMP
j'ai l'impression que cette procédure n'a pas eu l'occasion de
fonctionner, mais je n'en suis pas certain.
Il est
évident que le président de l'Assemblée nationale procède à toutes les
nominations dont il a la charge (Conseil constitutionnel, Conseil
supérieur de la magistrature, Conseil supérieur de l'audiovisuel, ... ).
il doit désormais faire avaliser son choix par la commission compétente
de l'Assemblée. Nul n'imagine qu'il puisse survenir un conflit.
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