mercredi 20 juin 2012
François Hollande est-il en train de préparer une reddition à l'Allemagne qui ne dit pas son nom ?
Autres sujets abordés cette semaine par
Serge Federbusch : les débuts du "redresseur productif" Arnaud
Montebourg, Vincent Peillon et les rythmes scolaires, la République
Twitter et la sortie de David Cameron sur l'accueil des exilés fiscaux
français.
Une
déclaration passée inaperçue de François Hollande, la semaine dernière,
aurait dû faire s’étrangler d’indignation la « gauche » : « Nous
avons besoin de croissance, elle ne naîtra pas simplement de
l'incantation, pas même de communiqués au terme de réunions européennes
ou mondiales. La croissance ne naîtra pas non plus de dépenses
publiques supplémentaires au moment où les Etats connaissent un
endettement élevé. »
Ainsi
donc, les théories les plus orthodoxes, qui postulent que la dépense
publique, par effet d’éviction sur les marchés financiers (elle fait
concurrence aux dépenses et emprunts privés) ou par effet d’anticipation
sur les impôts à venir, ne conduit à aucune croissance supplémentaire,
sont validées par le néo-président ex-socialiste !
Cette conversion doublée d’une reddition idéologique sans conditions s’accompagne d’une formule apparemment contradictoire : « La
croissance peut surgir d'une volonté commune, celle que l'Europe peut
affirmer, de mettre en place des instruments nouveaux :
euro-obligations, instruments financiers, notre imagination peut être
grande ... »
Mais qu’est-ce au
juste ? Le « Journal du dimanche » nous en dit plus. François Hollande
envisage un plan de «relance» à 120 milliards d’euros dont en réalité 55
milliards sont le déblocage de fonds structurels déjà existants et 65
milliards des levées d’emprunt de la Banque européenne d’investissement
(BEI) ou de groupes d’Etats pour financer des projets d’infrastructures
(Project bonds). Malgré les apparences, ceci ne va pas très loin : le
seul secours d’urgence accordé aux banques espagnoles il y a quinze
jours, sans aucun effet sur leur situation du reste, était du même
ordre. Et les mesures d’assouplissement quantitatif - comprendre l’usage
de la planche à billets - de Mario Draghi sont près de 10 fois plus
importantes.
La modestie des
objectifs de François Hollande en matière de relance prépare-t-elle
l’opinion à un accord avec l’Allemagne qui aura en réalité imposé ses
vues ? C’est probable.
Mais Hollande a-t-il le choix ? S’il ne prend pas, dans les semaines qui viennent, des mesures de grande rigueur budgétaire, cocufiant ses électeurs,
les taux d’intérêt payés par la France vont rapidement monter et la
situation budgétaire devenir intenable. C’est cela, ou commencer dès
maintenant à préparer la sortie de l’euro.
Encore
une étrange déclaration du ministre du redressement industriel la
semaine dernière. Dans sa ligne de mire, l’ARCEP, autorité de régulation
des communications qui se voit reprocher les licences accordées à FREE,
son rôle dans la libéralisation du secteur et le fait d’empiéter sur
les prérogatives du « politique ».
Ainsi
donc, le gouvernement, la présidence de la République, l’Assemblée
nationale, le Sénat, les régions, les départements et les grandes villes
ne suffisent pas au Parti socialiste. Il faut également mettre au pas
les rares autorités indépendantes qui subsistent.
Car, selon cet interventionniste en chef, il importe
de : « Remettre de l'ordre dans les télécoms. Comment donc avons-nous
trouvé le génie de mener la concurrence du marché à un tel point qu'il
s'auto-détruit ?".
Le fait que la baisse des prix à
la consommation - dont se réjouissent les utilisateurs français de
téléphone portable - et la pression concurrentielle soient les plus
importants facteurs de croissance et de création d’emplois à moyen et
long termes est évidemment ignoré de ce ministre qui cherche à
réhabiliter l’étatisme industriel. Mais il est vrai qu’il n’est pas en
charge du redressement à long terme.
Le
pauvre Vincent Peillon, cavalier minuscule sur le dos du Mammouth de
l’éducation nationale, ne sait plus à quelle idole sacrifier des jours
ouvrés scolaires pour aussitôt en récréer à un autre moment de l’année.
Monsieur Ayrault, le Premier ministre dont la tâche va consister
essentiellement à garder les chiourmes gouvernementaux ne cesse, lui, de
le recadrer. Il faut dire qu’il fut autrefois professeur dans le
secondaire, tout comme monsieur Peillon. Dans la classe gouvernementale,
les coups de règle sur les doigts et les bonnets d’âne vont bientôt
reprendre du service. La « gauche » éducative et ministérielle est-elle
en passe de renoncer à son pédagogisme délétère pour en revenir aux
bonnes vieilles méthodes ?
Ségolène
Royal, avec ses clubs Désirs d’Avenir et son utilisation d’Internet,
avait eu un temps d’avance, en 2007, pour souffler à la barbe de ses
camarades la candidature à la présidentielle. Cinq ans plus tard, la
voilà victime de la twittitude. Avec sa rivale Valérie Twitweiler pour
figure de proue, journalistes et politiciens ont trouvé un nouveau
langage commun : le twit (ou tweet on ne sait plus). 140 signes : c’est
bien suffisant pour une réaction, un bon mot, un coup fumant, un
anathème, une injure déguisée. Puisqu’il est impossible
d’élaborer un projet et encore moins une pensée en si peu d’espace, on
est vite dispensé de le faire. Le twit est un permis d’asséner, une
dispense de démontrer.
Enfant de la
société des réseaux, le twit favorise la connivence et l’endogamie
politique : de followers à followers, on s’ausculte, on se diffuse.
C’est le nombrilisme en nom collectif. Piégés par les téléphones
portables et Youtube, qui enregistrent leurs dérapages verbaux, les
politiques retrouvent la maîtrise de leur expression grâce au twit.
Le
twit présente également l’avantage d’être compatible avec
l’illettrisme. Inutile de se fatiguer en subtilités grammaticales et de
trop regarder à l’orthographe. Sa brièveté vaut relâchement plus que
concision. Le haïku japonais, tout en rapidité et de style enlevé, avait
le goût de la sonorité, l’exigence du jaillissement poétique, le souci
du beau. Le twit est dans l’immédiat à-peu-près.
« Son
programme tient en un twit » s’est gaussé Obama en attaquant Mitt
Romney, son adversaire républicain. Mais sa critique n’est guère plus
prolixe, hommage du vice au vice.
Soyons réalistes, contentons-nous d’un twit :
puisque tous font la même politique et qu’il n’y a pas de marge de
manœuvre, twittons, twittons, il en restera toujours quelque chose.
Trop
de twits va-t-il tuer le twit ? Pas sûr. En tous cas pas tout de suite.
Il y aura d’abord les olympiades du twit, les twit-battles, les
cafés-twits, une twit-banque centrale pour renflouer les Twit-Etats en
faillite. Un jour, proche peut-être, un autre gadget aura évincé
celui-là. Espérons au moins qu’il tienne le temps de cette mandature
présidentielle. Car, sans être un twitter-addict, le président
« normal » a capté l’esprit de ces messages : il en dit le moins
possible.
Décidément, il ne fait pas bon promener un socialiste français en Europe par les temps qui courent. Entre
David Cameron qui se permet des ironies libérales, expliquant qu’il
pourra financer ses services publics grâce à la richesse créée par les
entrepreneurs français ayant fui la fiscalité prohibitive de leur pays
et qui se seront réfugiés en Grande Bretagne et Mario Monti qui ne parle
que d’augmenter la durée du travail pour sortir l’Italie de la crise,
les idées de nos nouveaux gouvernants ne rencontrent que peu d’écho hors
de France. Heureusement que nos médias ne sont pas gangrenés, eux.
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