TOUT EST DIT

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samedi 23 octobre 2010

En français dans le texte

La francophonie en tant que concept politique souffre d'un handicap congénital : certains s'obstinent à n'y voir que la langue du coq gaulois. Cela suffit à les indisposer. Pour peu que se mêle au débat une pincée de rancune coloniale venue d'Alger ou d'Abidjan, on a tout pour remiser la francophonie au rayon des accessoires encombrants qui eurent leur heure de gloire mais ont fini par prendre la poussière.
La francophonie ne doit plus être pensée de façon centrale, à partir de Paris, mais de façon polycentrique, comme une langue partagée fraternellement. Plus elle sera partagée, plus elle vivra activement. Si le français ne veut pas se recroqueviller sur lui-même comme certains patois ou dialectes qui manquent tragiquement de locuteurs, il lui faut accepter avec joie et reconnaissance les trouvailles linguistiques venues du Québec ou d'Afrique : elles contribuent à donner du jus à une langue ancienne qui se scléroserait en se limitant bêtement à l'Hexagone.
La perte d'influence du français est due à la faiblesse de la branche culturelle du Quai d'Orsay, qui manque singulièrement de moyens et n'hésite pas à faire passer les arts plastiques avant l'objectif majeur, à savoir l'aide aux jeunes qui ont (encore) envie d'apprendre le français. Des associations francophones actives en Roumanie, en Bulgarie ou en Arménie (hors des capitales) se battent les flancs pour mener à bien leurs activités mais voient leur public vieillir au fil des décennies. Des lycées d'Europe centrale en quête d'une solide coopération éducative avec un lycée français se désespèrent de voir leur enthousiasme douché par le déclin des activités périscolaires dans les académies de France, de Navarre ... ou d'Alsace.
L'enjeu de la francophonie ne se mesure pas au rayonnement culturel de la France : ce serait de la gloriole. Il n'est pas non plus dans l'idée désuète d'ériger une digue face à l'anglais ou à ses dérivés. L'enjeu est de maintenir à l'échelle de la planète un plurilinguisme où le français aura sa place à côté d'autres langues comme l'allemand, l'espagnol, le portugais, le russe, l'arabe, le chinois ou le swahili. La langue n'est pas qu'un outil de communication. Elle façonne et structure la pensée. A ce titre, le plurilinguisme est un moyen de maintenir la diversité des approches philosophiques sans aller inexorablement vers un tronc qui, à force d'être commun, se métamorphoserait en laminoir.


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