TOUT EST DIT

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jeudi 16 septembre 2010

Le désordre et le mouvement

Si nos enfants avaient pu assister à la séance de l'Assemblée nationale, hier après-midi, ils auraient eu le droit - eux - de huer les acteurs. Pour un vote qui les concerne - après tout, ce sont eux qui les paieront, les retraites ! - la représentation nationale a offert un spectacle navrant, dégradant pour elle et insultant pour le pays. Tout républicain sincèrement attaché à la représentation parlementaire n'a pu qu'éprouver de la tristesse en voyant ainsi piétiner les règles les plus élémentaires du vivre ensemble démocratique.
On a vu des députés, charette comme des étudiants, siéger seize heures de rang, pour boucler avant l'aube, tels des forcenés législateurs, l'examen d'un texte essentiel, au risque de bâcler les chapîtres pénibilité, emploi des seniors, femmes... On a vu d'autres députés, de l'opposition ceux-là, brailler dans les couloirs du Palais-Bourbon pour réclamer la démission de leur président, comme des supporters du PSG éructant contre leurs dirigeants. On a entendu des discours nuls, surjoués de part et d'autre, psalmodier en boucle des arguments prévisibles et mille fois entendus. Et on a beau se dire que tout ce vide fait partie du luxe d'un pays libre, ce fut une défaite pour le verbe et une déroute pour l'esprit français qui ne mérite pas un tel affront.
A qui la faute ? A tout le monde.
A la petitesse d'un Bernard Accoyer exhibant comme un Sam'suffit ses 62 heures de débat (on frissonne). Pétrifié à l'idée de désobéir à l'Élysée en accordant 13 petites heures supplémentaires à d'ultimes interventions. Il fallait conclure, certes, mais pourquoi abréger aussi sauvagement une liberté de parole aussi symbolique ?
A la médiocrité d'une opposition si peu imaginative dans son obstruction, et si peu respecteuse de l'image, précieuse, du président de l'Assemblée qui avait résisté, depuis 52 ans pourtant, aux vicissitudes et aux alternances de la Ve République.
A l'été 2008, on s'était réjoui que la réforme constitutionnelle, imaginée par la président de la République, rende aux parlement de son pouvoir et de ses prérogatives. C'était un mouvement moderne ! Hier, c'est un désordre archaïque et régressif qui s'est étalé sous nos yeux.
Le chef de l'État a largement contribué à démolir sa propre construction. La gestion calamiteuse de l'affaire Bettencourt - mise au jour par la justice et le procès Banier et non par la presse ! - et les calculs électoraux qui ont inspiré la scénarisation volontairement claironnante des expulsions de Roms, ont pollué la discussion de la réforme des retraites. Elle était condamnée à être conflictuelle, voire caricaturale. Pas à sombrer dans le misérable. Cette loi, le président la disait « emblématique » de son quinquennat. Elle a été votée sur un champ de ruines.

Olivier Picard

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