Quelle foire d'empoigne hier à Bruxelles, impossible à cacher, même sous la plus nouée des langues de bois diplomatiques ! Avec prise de tête entre Nicolas Sarkozy et José Manuel Barroso, un président de la Commission pourtant longtemps « favori » de la France en raison de sa « flexibilité » ! Avec les remarques acerbes des Finlandais, avec la mise au point des Autrichiens rappelant à Paris qu'au niveau des institutions européennes, il n'y avait ni grands ni petits pays de l'UE et que le respect des traités s'appliquait à tous. Sans oublier les positions aussi modérées que gênées des autres pays, Allemagne comprise.
La circulaire ministérielle du cabinet Hortefeux désignant nommément la minorité ethnique des Roms a fait plus qu'empoisonner ce Conseil européen initialement consacré à la stabilisation monétaire, au G8 et au G20. Elle a isolé la France, également à cause - dans l'indignation, sans doute - de ses réactions aux propos de Viviane Reding, réactions qui n'ont rien changé sur le fond : la lettre comminatoire de la Commission envisageant des poursuites a été envoyée à Paris, la commissaire n'a pas présenté la moindre excuse, seulement formulé des « regrets » quant aux interprétations de ses dires. Et que le président Sarkozy ait fait allusion à la nationalité luxembourgeoise de Viviane Reding est jugé d'autant plus déplacé que dans ses décisions la Commission est par définition « communautaire », au-delà des États, dans le seul respect des traités liant les 27. Ce que la France a voulu oublier...
Certes, la politique européenne est avant tout, voire exclusivement, de la Realpolitik. Voilà pourquoi, devant les problèmes qui s'amoncellent, ce clash sera vite oublié. Mais pas ses traces. Dans l'Europe élargie, la France a surtout su s'imposer par son poids moral et historique, plus que par ses performances économiques.
Ce crédit politique souffre désormais de sérieuses entames augurant mal de cette influence française. Et cela à cause de réactions précipitées et électoralistes sans rationalisme, sans en prévoir les conséquences. Ainsi, la législation européenne ne s'oppose pas au démantèlement de camps illégaux portant atteinte au droit de propriété et ne répondant pas aux normes sanitaires. Les accords de libre circulation et d'installation chez les 27 laissent (sous conditions) entendre que les citoyens européens migrants doivent disposer d'un travail ou de ressources propres. En ce sens, la France n'est pas en défaut. Mais il y a la manière de faire. Pas en désignant une minorité en bouc émissaire.
Le plus affligeant dans ce charivari est que le vrai problème posé à toute l'Europe, celui de l'intégration des Roms, n'a même pas été abordé. Ce sera pour plus tard, paraît-il. Aux calendes grecques...
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