TOUT EST DIT

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vendredi 17 septembre 2010

George Osborne : « Vivre aux dépens de l'Etat n'est plus une option possible »

Le chancelier de l'Echiquier britannique, quarante ans, très proche du Premier ministre David Cameron, rend visite à Christine Lagarde. Il explique que le plus gros risque encouru par les économies européennes est le retour du risque de crédit souverain. .
Vous vous apprêtez à diminuer le poids de l'Etat dans l'économie britannique encore plus que Margaret Thatcher ne l'avait fait ? Pourquoi être aussi extrême ?
Parce que le nouveau gouvernement a hérité d'un déficit budgétaire de 11 %, le pire du G20. Le plan annoncé en juin était nécessaire pour restaurer la stabilité et redonner confiance, ici et à l'étranger, dans la capacité de la Grande-Bretagne à honorer ses engagements.
Même les marchés pensent que vous n'étiez pas obligés d'aller si vite…

En fait, il y a eu des signaux qui montraient que les marchés étaient inquiets. Les agences de notation s'interrogeaient sur la qualité de notre signature. Depuis les élections, les taux d'intérêt britanniques ont baissé, alors que des pays comme l'Espagne ont vu les leurs grimper. Nous avons réussi à prendre nos distances avec les pays auxquels nous étions associés auparavant. Et la baisse des taux d'intérêt a eu un effet de stimulation monétaire.
Etes-vous prêts à affronter une période houleuse socialement ?

Le public britannique comprend dans une très large mesure pourquoi nous faisons cela. Pendant une décennie, les dépenses publiques ont échappé à tout contrôle et augmenté de 45 %. Et nous avons fait campagne avec le projet explicite de réduire la dépense publique, tout comme les libéraux démocrates, nos alliés dans la coalition. C'est un élément clef.
Un sondage montrait récemment que le soutien aux coupes dans les dépenses diminuait, y compris chez vos supporters…

Je m'interroge sur les questions de ce sondage… Même des figures importantes de la précédente administration comme Tony Blair ou Peter Mandelson ont reproché à leur propre parti de ne pas prendre ce problème à bras-le-corps.
En quoi votre approche diffère-t-elle du conservatisme de Thatcher ?

La situation a complètement changé. Et nous allons procéder à ces coupes d'une façon juste. Je prendrai l'exemple de deux décisions que Margaret Thatcher n'aurait sans doute pas prises. Nous allons épargner le système national de santé. Et -c'est assez remarquable -, notre budget d'aide au développement international va continuer à augmenter.
Vous venez de déclarer que c'en était désormais fini du « style de vie consistant à rester assis à attendre les subsides publics ». N'est-ce pas un discours trop radical ?

Les dépenses de redistribution représentent un tiers des dépenses de l'Etat. Il n'est pas possible de restaurer les comptes publics sans s'y attaquer. Le système de protection sociale doit récompenser le travail et chercher à résoudre le fait que 5 millions de britanniques vivent d'aides d'Etat. Même quand la conjoncture est bonne. Bien sûr, ceux qui ne peuvent pas travailler, nous les soutiendrons, et même davantage. Mais franchement, pour ceux qui pensent que ce style de vie est un choix possible, cette option est terminée.
Beaucoup de gouvernement ont échoué dans cette tâche…

Oui mais il y a des exceptions : même si je ne dis pas que nous allons répliquer cet exemple, l'administration démocrate de Bill Clinton en est une. Assez souvent les gouvernements qui ont réussi à réduire leurs déficits étaient des gouvernements progressistes de centre gauche comme au Canada ou en Suède. Car une perte du contrôle des finances publiques est ce qui punit le plus les pauvres.
Ne pensez-vous pas qu'il y aura toujours une partie de la population difficile à mettre au travail et qu'il est contre-productif pour une société de cesser de l'aider ?

C'est une attitude défaitiste. Même dans les familles qui ne travaillent pas depuis trois générations, il est possible de rendre le sens de l'ambition. Laissez-moi vous donner un exemple de ce que je tiens pour injuste. Certaines familles en Grande-Bretagne recevaient 100.000 livres par an d'aides au logement ! C'est totalement inacceptable. C'est l'équivalent de l'impôt payé par 16 personnes actives !
Des économistes tout à fait crédibles et de votre propre camp pensent que vous prenez un risque inconsidéré avec l'économie ?

Je rejette cet argument. Imaginez la situation, si j'avais dit : « Je n'ai pas l'intention de changer le budget dont j'ai hérité. » Il y aurait eu une perte de confiance catastrophique au Royaume-Uni. Le plus gros risque pour les économies européennes est le retour du risque de crédit souverain. Nous avons été prudents dans nos prévisions. C'est autour de ce projet que nous pouvons restaurer la stabilité sur laquelle bâtir le redressement de l'économie.
Pourquoi est-il dans l'intérêt de la Grande-Bretagne d'être dans l'Union européenne ?

La Grande-Bretagne bénéficie énormément de sa présence dans l'Union européenne. Le marché unique nous permet de commercer avec tous les pays de cette zone. Nous bénéficions de la stabilité politique que l'Union a apportée à notre continent. Une des plus belles réalisations de l'Union au cours de ma vie a été l'élargissement à l'Est et l'inclusion de pays qui étaient derrière le rideau de fer quand j'ai grandi. Je n'aime pas tout dans l'Union, mais la Grande-Bretagne se doit d'être un membre actif.
Jusqu'où seriez-vous prêt à aller pour sauver l'euro si un pays de la zone connaissait une crise souveraine grave ?

J'approuve l'accord trouvé par mon prédécesseur Alistair Darling, le jour avant que nous prenions nos fonctions. Il revient d'abord au pays de la zone euro de sauver un de ses membres.
Partagez-vous la vision française selon laquelle l'Allemagne pourrait se permettre de jouer un rôle plus actif dans la croissance européenne ?

Compte tenu de leur longue histoire de défiance vis-à-vis des déficits, les Allemands auraient pu être plus agressifs. Ils ont choisi le bon rythme étant donné leur situation économique.
La France va présider le G20. Quelles sont vos requêtes ?

La présidence française est une excellente opportunité de s'assurer que les réformes du système financier sont bien mises en application. Et que les sujets qui inquiètent la France comme la volatilité des marchés soient examinés correctement. Je sais que Christine sera une présidente efficace des ministres des Finances. D'ailleurs je lui rends visite et cela faisait longtemps qu'un chancelier était venu pour une visite bilatérale avec son homologue français.
Le gouvernement français avait une bonne relation avec l'administration de Gordon Brown. Pensez-vous qu'il y ait une communauté de vues aujourd'hui entre les gouvernements français et britannique ?

La France est un de nos alliés les plus proches. Il y a bien sûr des hauts et des bas dans notre relation mais nous avons beaucoup d'intérêts communs : nous sommes deux économies de la même envergure, avons des armées et des objectifs de politique étrangère similaires. Le nouveau gouvernement a fait de sa relation avec la France une priorité. Très tôt, David Cameron a rendu visite à Nicolas Sarkozy. Nous voulons faire cause commune. En nous mettant d'accord, nous pouvons influencer le cours des choses dans le monde.
Pensez-vous que les gouvernements de centre-droit européens peuvent s'inspirer de votre approche consistant à transférer les pouvoirs de l'Etat central vers les individus, les groupes sociaux, ou les entreprises, ce que vous appelez la « Big Society » ?

Oui, j'espère. Deux choses intéressantes se produisent. La première est que la récession ne s'est pas traduite par un rejet des partis de centre droit attachés à la liberté des marchés. Les gens comprennent que les propositions anticapitalistes opportunistes de la gauche ne sont pas ce dont le monde a besoin. La deuxième est que les partis de centre droit ont compris qu'ils doivent représenter davantage que le libéralisme économique. Le marché et les choix individuels ne résolvent pas tout. Les communautés doivent se mobiliser ; les familles sont des institutions importantes : il y a une « Grande Société ». Tous les problèmes graves ne peuvent pas être résolus en déversant plus d'argent public.
PROPOS RECUEILLIS PAR NICOLAS MADELAINE

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