Au moins, les choses sont dites. 62 ! Ce ne sera plus seulement le refrain aux accents minéralogiques de Claude François, mais une altitude. Celle, minimum, qu'il faudra atteindre pour avoir le droit de prendre sa retraite à taux plein. Hier après-midi, dans tous les bureaux de France, les calculettes ont chauffé pour estimer, réestimer et réestimer encore - comme les Shadoks qui pompaient, pompaient, pompaient - ces « trimestres » de quatre mois supplémentaires où il faudra cotiser pour gagner, enfin, un repos forcément bien mérité. Cette prosaïque fébrilité est représentative d'un débat englué dans la comptabilité quand il aurait dû être visionnaire. Ce ne sont pas - hélas - quelques mois grattés ici ou là pour aboutir à 19 milliards d'économie qui assureront la pérennité du système. Il y a fort à parier que le dispositif annoncé hier par Éric Woerth ne suffira pour garantir à tous des pensions à un taux décent dans 10, 20 ou 30 ans. Même si cette décision était sans doute nécessaire, il ne s'agit pas seulement de décaler mécaniquement l'âge minimum légal de départ à la retraite de deux, voire trois ou quatre ans pour régler durablement le problème. On ne fait que rafistoler une fois encore une machine du XXe siècle. La recherche, indéniable, d'un effort également réparti reste si frileuse qu'elle offre le flanc à la critique. Le relèvement de la tranche la plus élevée de l'impôt n'est que symbolique tout comme la taxation du capital, quand la contribution des salariés reste majeure. Les longues carrières sont les premières victimes de la réforme, frappées par une sorte de double peine. Quant à la définition de la pénibilité - laissée à l'appréciation des médecins - elle est si restrictive qu'elle semble obéir à une logique qui remonte aux mines et aux locomotives à vapeur. Une nouvelle architecture du système, à la fois souple, juste et équilibrée reste à inventer. Mais a-t-on vraiment la volonté de changer le modèle standard pour un logiciel à géométrie variable, plus en phase avec la nouvelle complexité du monde du travail du XXIe siècle ? Accepter l'idée de devoir travailler plus longtemps apparaît comme une évidence, oui, mais elle ne peut pas s'appliquer à tout le monde, uniformément. A-t-on seulement réfléchi au qui ? comment ? et pourquoi ? A-t-on seulement essayé de prendre le risque de remettre en question une logique faussement égalitaire ? Le gouvernement, l'opposition et même les syndicats les plus ouverts ont été objectivement complices pour étouffer le débat dans des caricatures du XXe siècle, étrangères aux défis des générations de nos enfants et de nos petits-enfants. Et quand le PS s'engage à rétablir la retraite à 60 ans s'il revient au pouvoir, il s'inflige, aux pieds, les boulets du passé, et aux mains, les menottes de la démagogie.
jeudi 17 juin 2010
« Soi-xan-te-deux »
Au moins, les choses sont dites. 62 ! Ce ne sera plus seulement le refrain aux accents minéralogiques de Claude François, mais une altitude. Celle, minimum, qu'il faudra atteindre pour avoir le droit de prendre sa retraite à taux plein. Hier après-midi, dans tous les bureaux de France, les calculettes ont chauffé pour estimer, réestimer et réestimer encore - comme les Shadoks qui pompaient, pompaient, pompaient - ces « trimestres » de quatre mois supplémentaires où il faudra cotiser pour gagner, enfin, un repos forcément bien mérité. Cette prosaïque fébrilité est représentative d'un débat englué dans la comptabilité quand il aurait dû être visionnaire. Ce ne sont pas - hélas - quelques mois grattés ici ou là pour aboutir à 19 milliards d'économie qui assureront la pérennité du système. Il y a fort à parier que le dispositif annoncé hier par Éric Woerth ne suffira pour garantir à tous des pensions à un taux décent dans 10, 20 ou 30 ans. Même si cette décision était sans doute nécessaire, il ne s'agit pas seulement de décaler mécaniquement l'âge minimum légal de départ à la retraite de deux, voire trois ou quatre ans pour régler durablement le problème. On ne fait que rafistoler une fois encore une machine du XXe siècle. La recherche, indéniable, d'un effort également réparti reste si frileuse qu'elle offre le flanc à la critique. Le relèvement de la tranche la plus élevée de l'impôt n'est que symbolique tout comme la taxation du capital, quand la contribution des salariés reste majeure. Les longues carrières sont les premières victimes de la réforme, frappées par une sorte de double peine. Quant à la définition de la pénibilité - laissée à l'appréciation des médecins - elle est si restrictive qu'elle semble obéir à une logique qui remonte aux mines et aux locomotives à vapeur. Une nouvelle architecture du système, à la fois souple, juste et équilibrée reste à inventer. Mais a-t-on vraiment la volonté de changer le modèle standard pour un logiciel à géométrie variable, plus en phase avec la nouvelle complexité du monde du travail du XXIe siècle ? Accepter l'idée de devoir travailler plus longtemps apparaît comme une évidence, oui, mais elle ne peut pas s'appliquer à tout le monde, uniformément. A-t-on seulement réfléchi au qui ? comment ? et pourquoi ? A-t-on seulement essayé de prendre le risque de remettre en question une logique faussement égalitaire ? Le gouvernement, l'opposition et même les syndicats les plus ouverts ont été objectivement complices pour étouffer le débat dans des caricatures du XXe siècle, étrangères aux défis des générations de nos enfants et de nos petits-enfants. Et quand le PS s'engage à rétablir la retraite à 60 ans s'il revient au pouvoir, il s'inflige, aux pieds, les boulets du passé, et aux mains, les menottes de la démagogie.
Au moins, les choses sont dites. 62 ! Ce ne sera plus seulement le refrain aux accents minéralogiques de Claude François, mais une altitude. Celle, minimum, qu'il faudra atteindre pour avoir le droit de prendre sa retraite à taux plein. Hier après-midi, dans tous les bureaux de France, les calculettes ont chauffé pour estimer, réestimer et réestimer encore - comme les Shadoks qui pompaient, pompaient, pompaient - ces « trimestres » de quatre mois supplémentaires où il faudra cotiser pour gagner, enfin, un repos forcément bien mérité. Cette prosaïque fébrilité est représentative d'un débat englué dans la comptabilité quand il aurait dû être visionnaire. Ce ne sont pas - hélas - quelques mois grattés ici ou là pour aboutir à 19 milliards d'économie qui assureront la pérennité du système. Il y a fort à parier que le dispositif annoncé hier par Éric Woerth ne suffira pour garantir à tous des pensions à un taux décent dans 10, 20 ou 30 ans. Même si cette décision était sans doute nécessaire, il ne s'agit pas seulement de décaler mécaniquement l'âge minimum légal de départ à la retraite de deux, voire trois ou quatre ans pour régler durablement le problème. On ne fait que rafistoler une fois encore une machine du XXe siècle. La recherche, indéniable, d'un effort également réparti reste si frileuse qu'elle offre le flanc à la critique. Le relèvement de la tranche la plus élevée de l'impôt n'est que symbolique tout comme la taxation du capital, quand la contribution des salariés reste majeure. Les longues carrières sont les premières victimes de la réforme, frappées par une sorte de double peine. Quant à la définition de la pénibilité - laissée à l'appréciation des médecins - elle est si restrictive qu'elle semble obéir à une logique qui remonte aux mines et aux locomotives à vapeur. Une nouvelle architecture du système, à la fois souple, juste et équilibrée reste à inventer. Mais a-t-on vraiment la volonté de changer le modèle standard pour un logiciel à géométrie variable, plus en phase avec la nouvelle complexité du monde du travail du XXIe siècle ? Accepter l'idée de devoir travailler plus longtemps apparaît comme une évidence, oui, mais elle ne peut pas s'appliquer à tout le monde, uniformément. A-t-on seulement réfléchi au qui ? comment ? et pourquoi ? A-t-on seulement essayé de prendre le risque de remettre en question une logique faussement égalitaire ? Le gouvernement, l'opposition et même les syndicats les plus ouverts ont été objectivement complices pour étouffer le débat dans des caricatures du XXe siècle, étrangères aux défis des générations de nos enfants et de nos petits-enfants. Et quand le PS s'engage à rétablir la retraite à 60 ans s'il revient au pouvoir, il s'inflige, aux pieds, les boulets du passé, et aux mains, les menottes de la démagogie.
Olivier Picard
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