Nicolas Sarkozy a de la chance: Gordon Brown affronte des législatives très difficiles à la fin du printemps. Le Premier ministre britannique doit donc mener une campagne de gauche face à des conservateurs qui ont le vent en poupe. En période électorale, il faut trouver des cibles efficaces. Le Premier ministre de la City s’en prend donc aux banquiers.
Cette année, à Londres, leurs bonus seront surtaxés à 50 % au-dessus de 25.000 livres de revenus, en fait, ils seront pratiquement coupés. C’est une décision importante qui aura des conséquences sur "l’industrie financière", comme on dit à Londres. Voilà un allié pour défendre un capitalisme plus "moral".
Gordon Brown a aussi de la chance: Nicolas Sarkozy doit, pour gagner les élections régionales, ne pas se laisser enfermer à droite. Le gouvernement français va donc mettre en place des mesures qui auraient été impossibles à décréter de Paris. Il fallait que MM. les Anglais tirent les premiers pour que la France ne risque pas de voir fuir de nouveaux talents à Londres ou à New York.
La principale justification de cette surtaxe est morale: si en 2009 les banques ont pu se rétablir et réaliser des profits, c’est grâce aux aides des Etats qui les ont recapitalisées. Or, à peine sauvées, à peine ces aides remboursées, les voilà reparties dans les excès d’hier: des rémunérations indécentes qui poussent à des comportements risqués pour tout le système.
Chacun peut comprendre l’indécence de primes difficiles à justifier par des performances individuelles. Les contribuables n’ont pas à financer les bonus des traders et des banquiers.
En Grande-Bretagne, les conservateurs n’ont pas critiqué cette décision. Pas plus que la gauche française. Et demain, malgré la réaction agacée d’Angela Merkel ("une charmante idée"), d’autres pays européens suivront. Ils savent que le Premier ministre britannique et le président français ont les opinions publiques pour eux. C’est la fin d’une certaine impunité des banques, ce que les spécialistes appellent le "too big to fail" (trop gros pour faire faillite).
Voilà donc la City arrimée à l’Europe, ce n’est pas rien. Ces mesures vont provoquer un bouleversement plus important. Les brillants esprits pourront retourner vers l’industrie "classique" qu’ils avaient désertée depuis une vingtaine d’années pour être mieux payés. Et s’ils aiment la finance, ils quitteront les grands établissements pour aller dans des structures plus petites mais où ils prendront les risques en étant actionnaires, des "partnerships". En somme, nous irions vers une finance plus responsable.
dimanche 13 décembre 2009
Une finance plus responsable
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