TOUT EST DIT

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vendredi 14 mars 2014

Éloge de la complexité


La sortie d’une crise de crédit n’est jamais chose simple, mais rappelons que celle qu’entament la plupart des pays du monde sera particulièrement complexe. Il faut certes se réjouir que, dès la fin 2008, l’intervention massive des banques centrales ait évité que les effets récessifs du désendettement ne précipitent le monde dans une spirale dépressive. Mais il faut regarder avec tout autant de lucidité les conséquences sur les scénarios de sortie de crise de l’immixtion sans précédent dans le cycle économique de la Fed, la Banque centrale européenne, la Banque d’Angleterre et la plupart des banques centrales des pays émergents.
Les grandes économies du monde, parce qu’elles ont été touchées par la crise successivement, mais aussi parce que leurs politiques monétaires ont été plus ou moins radicales, se situent aujourd’hui à des stades très différents de leur cycle économique.
Ainsi, les États-Unis sont déjà bien avancés dans le cycle, tandis que la zone euro sort tout juste de la récession. La Chine est déjà en phase de ralentissement, tandis que le Mexique suit d’assez près le cycle américain, et l’Inde est sur le point de repartir. Cette complexité est souvent mal comprise par les observateurs, qui ne voient qu’une zone développée en redémarrage et un univers émergent homogène en ralentissement.
L’interaction entre ces économies dans un monde globalisé ajoute à la complexité. Ainsi, la nécessité pour la Fed de commencer à replier son artillerie monétaire au fil du redressement de l’économie américaine induit des effets très sensibles pour ses voisins. La moindre profusion de liquidités globales amène ces dernières à devoir choisir plus soigneusement où elles souhaitent s’investir.
Certains pays, pour éviter que les capitaux ne les fuient trop, ce qui provoquerait une baisse excessive de leur monnaie, n’ont d’autre choix que de relever leurs taux d’intérêt. Or ce resserrement “imposé” de leur politique monétaire concerne par définition les économies les plus fragiles, qui risquent, ce faisant, de voir retarder encore davantage leur sortie de crise. C’est le cas de la Turquie, de l’Afrique du Sud, voire du Brésil.
D’autres pays subissent aussi, avec le reflux des liquidités globales, l’affaiblissement de leur monnaie, mais plus par contagion que par défiance. C’est le cas du Mexique et de l’Inde. Ces pays affichent des fondamentaux économiques solides ou au moins prometteurs. Par conséquent, la baisse de leur monnaie, dès lors qu’elle demeure contenue, constitue davantage une source de renforcement de leur compétitivité qu’une malédiction.
Le cas de la Chine est encore différent. Son économie est déjà en phase de ralentissement et elle doit, dans le même temps, se soucier de résorber les multiples déséquilibres nés de sa réaction à la crise de 2008 (gonflement du crédit, shadow banking, etc.). C’est un défi considérable qui risque de peser encore davantage sur son rythme de croissance. En revanche, les énormes liquidités disponibles dans l’économie chinoise, que ce soit dans le bilan des banques ou dans les réserves de sa banque centrale, rendent ce pays beaucoup moins vulnérable que d’autres au resserrement des liquidités globales (et d’autant moins que les marchés de capitaux chinois de meurent largement fermés).
Le Japon se situe sur une trajectoire radicalement différente : ainsi, si la zone euro flirte avec la menace déflationniste, le Japon est en train de s’en extirper, au moyen d’une politique monétaire et fiscale particulièrement audacieuse. Les situations sont donc très disparates. Cette complexité ne doit cependant pas effrayer l’investisseur. Bien au contraire. Elle est moins périlleuse que ne le serait un cycle économique unifié, qui mènerait immanquablement à des excès. Elle offre même de multiples opportunités d’investissement à moyen terme à qui fera l’effort de l’appréhender dans toute sa richesse.

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