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dimanche 3 novembre 2013

Colère bretonne: un risque de contagion

Colère bretonne: un risque de contagion

Un conflit brouillé. Chacun en veut à l’autre mais tous en veulent au gouvernement: à l’image des violences de Quimper, des revendications hétéroclites des manifestants et des récupérations plus ou moins obscènes de certains politiques, la crise bretonne devient de plus en plus brouillée.(Commentaire paru dans Dimanche Ouest-France du 3 novembre 2013) Des patrons licencieurs à côté de salariés licenciés; des éleveurs pressurés par des industriels eux-mêmes dans l’impasse; des grandes enseignes solidaires de ceux qu’elles étranglent; des dirigeants UMP et UDI qui contestent, à côté d’extrémistes, leur propre écotaxe ; des syndicalistes qui défilent à Quimper, d’autres à Carhaix, d’autres qui ne défilent pas, des jacobins et des décentralisateurs... De cette confusion peut naître le pire.
Pour comprendre la colère bretonne, il faut sérier les problèmes. Il y a, pour tout le pays, une panne de croissance, aggravée par la hausse des prélèvements destinée à redresser les comptes publics. Et il y a des particularités propres à la Bretagne ou, en tout cas, à certaines activités fortement représentées dans l’Ouest.
Causes générales et locales. Si l’histoire ne se répète pas, elle offre parfois des similitudes. C’est un peu comme si nous étions revenus en 1675 lorsqu’en pleine récession économique et commerciale, Louis XIV voulut lever de nouveaux impôts, en particulier le fameux papier timbré, pour payer la guerre contre la Hollande.
Mais que ce soit au XVIIè siècle (révolte des Bonnets rouges), ou en 1961 (révoltes paysannes contre l’effondrement des cours), en 1962 (bataille contre les tarifs du rail), en 1968 (le plan routier, portuaire et téléphonique breton) ou en 1969 (le référendum sur la régionalisation annoncé le 2 février par De Gaulle, à... Quimper), le sentiment d’abandon demeure le fil rouge de la virile relation avec Paris.
Au-delà des causes immédiates de la crise, il y a ce que tout le monde sait depuis toujours: l’éloignement géographique, le dumping européen, la fin des subventions auxquelles certains s’étaient trop habitués, le prix de la main-d’œuvre et le poids de la fiscalité sur des produits à faible valeur ajoutée et à faible marge, le sous-investissement et la sous-qualification...
Mais si une partie de l’agroalimentaire est en crise, d’autres branches, qui ont su créer de la valeur, vont bien voire manquent de main-d’œuvre.
Une logique infernale qui tire cette économie par le bas: acheter, produire et vendre toujours moins cher, produire toujours plus pour se rattraper sur les quantités. A ce compte-là, la moindre variation de cours, la moindre concurrence nouvelle, la moindre taxe supplémentaire font des dégâts. Endiguer la contagion. A causes multiples, réponses multiples: agir au niveau européen pour mettre fin au dumping, jouer moins sur la fiscalité et plus sur la dépense publique, déléguer aux Régions ce qu’elles feraient mieux que l’Etat. Ces crises naissent toujours de la panne de croissance, conjuguée à un sentiment d’abandon et à l’impôt de trop. La Bretagne n’est pas la France. Mais les Français pour qui le fardeau fiscal est d’autant plus insupportable que menace le chômage pourraient bien se sentir un peu bretons.

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