TOUT EST DIT

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lundi 28 octobre 2013

Dictature des lève-tôt : le passage à l’heure d’hiver, rare moment de répit dans la vie des 40% de personnes dont la société violente le rythme biologique de sommeil


Le changement d'heure, cette nuit, nous a permis de gagner une heure de sommeil. Un gain loin d'être superflu pour de nombreuses personnes : une étude montre que l'horloge interne de 40% des Européens est en décalage avec le temps réel.
"Le monde appartient à ceux qui se lèvent tôt", paraît-il. Peut-être. Mais les croyances et adages populaires de ce type qui font la gloire du travailleur valeureux qui se lève aux aurores ont surtout des conséquences sur notre santé. Selon les travaux du chronobiologiste Till Roenneberg, chaque individu possède un chronotype différent - un type de synchronisation interne qui règle le temps de sommeil dont vous avez besoin. Celui-ci varie même en fonction des caractéristiques de chaque personne, notamment son âge.
Une idée qui s'oppose donc au préjugé selon lequel les "lève-tard" seraient des paresseux. Pis, les exigences de la vie moderne (travail, obligations sociales, etc.) ont même tendance à altérer notre sommeil, provocant un décalage entre notre horloge biologique interne et le temps social. Nous serions donc sujets à ce que Till Roenneberg appelle un "jet-lag social" qui, contrairement au jet-lag provoqué par un long voyage, n'est pas ponctuel mais chronique et ne nécessite aucun déplacement physique. Selon le chronobiologiste, plus de 40% de la population d'Europe centrale souffrirait d'un décalage horaire social de deux heures ou plus. Ils sont même 15% à avoir plus de trois heures de décalage avec le temps réel. Et rien ne laisse supposer qu'une recherche effectuée dans d'autres pays occidentaux donnerait des résultats différents.
Interrogée par Atlantico.fr, le Professeur Isabelle Arnulf, spécialiste du sommeil au groupe hospitalier Pitié-Salpétrière, estime toutefois que ce ne sont pas tant les rythmes du travail qui dérèglent le sommeil mais plutôt l'apparition des "écrans" tels que les ordinateurs ou les tablettes : "L'utilisation de ces écrans empiète le soir sur le temps du sommeil. C'est un phénomène que l'on ne connaissait pas avec la télévision, devant laquelle les gens s'endorment, mais qui se vérifient avec les ordinateurs, qui créent de l'interaction et maintiennent donc éveillés". Selon elle, les adolescents sont les principaux concernés par ces troubles du sommeil, puisque ce sont eux les premiers utilisateurs de ces technologies.

Le sommeil des ados serait donc doublement perturbé : par leur utilisation un peu abusive des ordinateurs et l'exigence des semaines de cours. Alors qu'il est prouvé qu'ils ont besoin d'environ huit à dix heures de sommeil par jour, les adolescents n' atteignent généralement pas ce quota durant une semaine de cours. Une étude récente a démontré que retarder d'une heure le moment du départ à l'école permettait à 50% des jeunes de dormir huit heures. Un chiffre qui se situe habituellement à hauteur de 37,5%. L'Australie a d'ailleurs décidé de tenter l'expérience.

Mais le constat de jet-lag social ne concerne évidemment pas que les seuls adolescents, bien qu'ils soient la population dont le sommeil est le plus fragile. "Notre horloge interne est un peu plus longue que les 24h d'une journée, explique le Pr Arnulf. Elle se retarde d'environ dix minutes par jour". Problème : lorsque le sommeil est affecté, c'est tout le corps qui en pâtit. Moins le sommeil est réparateur, plus notre santé est en danger, d'un point de vue moral comme physique. Il existe heureusement quelques solutions pour "régler" à nouveau notre horloge interne : "L'exposition à la lumière du jour, particulièrement le matin, permet au corps de combler le retard qu'il prend quotidiennement".
L'Organisation mondiale de la Santé a finalement abondé dans le sens des travaux du Pr Roenneberg en insistant sur le danger représenté par les emplois qui provoquaient un trop grand décalage horaire interne. Elle a récemment classé le "travail qui implique une perturbation du rythme circadien (tous les processus biologiques qui ont une oscillation d'environ 24 heures, ndlr)" comme étant une cause potentielle de cancer.
Mais si les effets bienfaiteurs d'une bonne nuit de sommeil sont connus de tous, le Pr Arnulf déplore le manque de recherche dans ce domaine. "Il n'y a qu'une dizaine d'équipes en France qui travaillent sur le sommeil. C'est insuffisant. Surtout que le sommeil représente un tiers de notre vie". De quoi déculpabiliser ceux qui auront envie de faire une petite sieste pour garder la forme.

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