De la différence naissent les peurs, puis les violences. L'exemple du sort réservé aux gens du voyage a inspiré le procureur Éric de Montgolfier.
lundi 5 août 2013
"Les gens du voyage, boucs émissaires des bien-pensants" par Éric de Montgolfier, c'est dire !!!!
L'âge venu, le temps passé vous rapporte sans cesse des bribes de votre enfance. Alors, comme une éponge, vous absorbiez les leçons de vos maîtres. L'éducation civique y tenait une large place, formant des citoyens pour la République. Des têtes bien faites, plutôt que seulement pleines. À entendre monter les cris de l'intolérance, il semble que nombre d'entre nous aient évité ce qui paraît aujourd'hui des écueils. Des têtes vides qui ont tout oublié des périodes les plus sombres de notre histoire. Les images d'Épinal nous montraient une France accueillante et généreuse. Sans doute avait-on forcé sur les couleurs chatoyantes. La réalité, cette triste réalité qui réduit à peu les élans de l'âme, en a vite corrigé les excès. Voici que, dans notre pays, certains appellent sans cesse à l'intolérance.
On aimerait croire que cette politique n'est que le produit d'une stratégie tendant à réduire l'influence du Front national. L'égaler pour ne point laisser le champ libre à ses outrances. Un peu la politique de Gribouille qui, les jours de pluie, se réfugiait dans une mare pour ne pas être mouillé. Mouillé, comme le doigt qui paraît servir à prendre le pouls de l'opinion afin de ne jamais la contrarier. Les sondages ont remplacé l'intelligence politique, elle-même supplantée par le besoin, souvent celui d'être élu. Faut-il vraiment s'accommoder de ce que la démocratie, à défaut d'être le meilleur des systèmes, en reste le moins pire ? Au moins atteint-on ici les limites de la démocratie représentative quand les élus se laissent guider plus qu'ils ne guident. Car ce ne sont pas les partis de l'extrême qui font naître les phénomènes de rejet qui se multiplient, mais ceux qui les portent d'autant mieux que d'autres, qui devraient en être éloignés, tendent à s'en rapprocher.
Pour se flatter de vivre au pays des droits de l'homme, notre peuple s'abîme trop souvent dans ses peurs. Les rejets viennent surtout de là et les périodes de crise économique les alimentent plus que de coutume. Mais cette explication ne vaut que partiellement. Toutes ces années, il m'a été donné de constater combien la différence provoquait cette inquiétude qui conduit à l'exclusion, pas seulement quand des intérêts vitaux sont en cause. Il me revient en mémoire un conseil de prévention de la délinquance dans un gros bourg du Nord. La réunion m'avait étonné tant les chiffres de la délinquance étaient minces. Un seul cambriolage l'année écoulée. Un de trop, certes, mais quand même... Je le fis valoir aux habitants quand ils évoquèrent l'insécurité dont ils souffraient. La semaine dernière, me répondirent-ils, il y avait, la nuit tombée, trois personnes sous un réverbère de la place. Oui... et bien ? "Ils n'étaient pas d'ici." Il suffit de peu en certaines contrées pour paraître étranger et justifier une crainte irraisonnée.
Au moins ne s'agissait-il pas de "gens du voyage", citoyens de cetteEurope qui se veut fraternelle ou simplement de France, que l'on affuble souvent, même au coeur des institutions, de vocables qui respirent davantage la discrimination que la sympathie. Partout, je les ai vus pourchassés, caricaturés, désignés comme fauteurs de troubles, asociaux, vivant de rapines, et j'en passe. Certes, leur mode de vie est-il sensiblement différent du nôtre, mais il n'est pas en soi contraire à nos lois. Au contraire, elles imposent, en admettant ainsi implicitement sa légitimité, la création d'aires pour les accueillir dignement. Mais les élus regimbent et préfèrent payer des pénalités, à la charge des communes, plutôt que de respecter la loi, comme c'est le cas pour les logements sociaux. Alors, l'occupation sauvage prend des allures de légitime défense.
Mais, même quand les communes respectent la loi, les aires d'accueil ne peuvent être adaptées aux déplacements saisonniers de grande ampleur. Alors, venus en nombre, les nomades s'installent au mépris des règles de la propriété. Cela pose de réels problèmes, sans doute plus encore pour les propriétaires privés que sur les terrains publics. Mais la collectivité, qui sait parfois reconnaître le droit des minorités, a le devoir de favoriser l'exercice normal de leurs libertés ; elle sait d'ailleurs fort bien, quand elle en tire avantage, se doter provisoirement des infrastructures nécessaires à l'accueil et au séjour des participants. Pourvu du moins qu'ils ne soient pas tenus pour indésirables... Les arguments utilisés pour s'y opposer en témoignent parfois, avec une pauvreté intellectuelle qui claironne les préjugés.
Ainsi, le maire de Nice s'est récemment ému de l'occupation forcée d'un terrain de sport de la ville. Mais pourquoi a-t-il fallu, outre ses habituelles rodomontades, qu'il évoque leurs grosses voitures ? Elles lui paraissent suspectes entre leurs mains. C'est vrai, non, ceux qui se déplacent ainsi devraient au moins avoir l'air pauvres ! À n'en pas douter, ce serait, aux yeux de l'édile, le signe de leur probité. Les grosses voitures vont bientôt fuir une ville dans laquelle elles suscitent si peu de considération, ce qui, à vrai dire, ne m'était pas apparu pendant les treize années que j'y ai passées. Mais avec un tel argument, la question est posée : après la chasse aux prostitués qui déparaient la promenade des Anglais, puis la stigmatisation des musulmans qui, faute de la mosquée promise, priaient dans la rue, serait-ce le tour des "gens du voyage" ? Comme les autres, cette cible a le mérite de rassembler les bien-pensants, peut-être les bien-votants, dans une ville dont le maire affirme précisément que les gens pensent comme lui. Espérons quand même que la contagion en épargnera quelques-uns.
J'ESPÈRE LE CONTRAIRE, LES GENS DU VOYAGE DOIVENT VOYAGER,
HORS DE FRANCE, C'EST MIEUX.
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