samedi 30 mars 2013
C’était Sarko
Les lignes qui suivent n’ont pas vocation à prouver ni à démontrer quoi que ce soit, pas même à défendre la politique du précédent quinquennat. Elles ne visent qu’à expliquer le sentiment d’injustice et d’accablement que les anciens collaborateurs de Nicolas Sarkozy, dont je suis, ont pu éprouver à la suite de sa mise en examen pour « abus de faiblesse » sur une vieille dame. Quand je travaillais parmi les membres de son cabinet, au ministère de l’Intérieur et à l’Elysée (6 ans et demi au total), je tenais chaque soir un journal de bord qui fait plus de 800 pages et que je publierai peut-être en partie, si un éditeur s’y intéresse, une fois respecté un délai de décence… Je voudrais publier ici un extrait de la journée du dimanche 28 février 2010 à la suite de la tempête Xynthia qui a ravagé la Charente maritime et la Vendée. Mais ce n’est qu’un exemple, parmi une multitude du même genre, quasi quotidiens, montrant qui est vraiment l’ancien chef de l’Etat.
« Après un vol de quarante minutes dans l’Airbus présidentiel jusqu’à l’aéroport de la Rochelle, nous embarquons précipitamment dans un hélicoptère de l’Armée de l’air. Le temps est de circonstance : un déluge s’abat sans discontinuer sur la région. Nous survolons les zones inondées, des villages entiers recouverts par la mer, des maisons, à perte de vue, dont seules la toiture et la pauvre cheminée émergent des eaux écumantes. L’hélicoptère vole à basse altitude et nous dépose à la Faute-sur-mer dont les environs ont été engloutis sous les eaux à la suite de la rupture d’une digue. La catastrophe a fait au total cinquante à soixante morts, dont une vingtaine dans cette commune, beaucoup de personnes âgées et d’enfants surpris dans leur sommeil par une vague gigantesque. L’horreur… Nous pataugeons dans la boue avec nos chaussures de ville. Nous suivons le président. Une vaste tente a été installée par la sécurité civile où reposent les victimes. Sarkozy y entre pour leur rendre hommage, accompagné du maire et du préfet. A travers le rideau de pluie glacée, je le vois en ressortir, livide, le visage ravagé par l’horreur de ce qu’il vient de voir. Lâchement, je ne l’ai pas accompagné à l’intérieur, me disant qu’il était inutile d’y être trop nombreux. Puis nous nous dirigeons vers une salle communale où quelques familles privées de toit ont été installées. Le Président, sonné, échange quelques mots avec chacune des personnes qui se trouvent là : « on va vous aider, je vous le promets, on est avec vous. » On lui présente une dame âgée, assise sur un siège, qui pleure: elle vient de perdre son mari et sa maison. Il lui parle et elle ne répond pas, semble ne pas l’entendre. Alors il lui prend la main et la tient sans rien dire, de longues minutes, blême, les traits durs, dévastés, les yeux hagards, comme tétanisé par le désespoir de la vieille femme. L’image me bouleverse, je ne l’oublierai jamais.
- Monsieur le Préfet, je vous fais confiance, hein, vous allez vous en occuper, lui trouver un hébergement sans délai.
- Je vous le promets Monsieur le Président…
- Et vous me tenez au courant.
- Oui, bien sûr.
Trempés, glacés, nous remontons dans l’hélicoptère qui nous ramène à la Rochelle. Le Président réunit autour de lui dans une grande salle de la préfecture les élus et les forces vives. Dans le discours qu’il prononce, il reprend exactement ma prose : « Ce que nous venons de vivre est une catastrophe nationale… La Charente maritime et la Vendée, deux départements martyrs… La solidarité nationale s’exercera sans aucune faille au profit de chacune des victimes… »
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