vendredi 15 juin 2012
Une mobilisation contrariée
Qui va voter dimanche ? La question est importante, car de la
mobilisation des électeurs dépendent le poids exact de la majorité
parlementaire dont disposera François Hollande et sa légitimité aux yeux
de l'opinion. Les Français ont été vingt millions, dimanche, à rester
chez eux. Un niveau historique d'abstention. Or, l'ambiance de cette fin
de campagne ne porte pas à l'optimisme.
Alors que François Hollande avait, jusque-là, réussi à éviter à peu
près tous les faux pas qui vous collent à la réputation tout un
quinquennat, il aura suffi d'un tweet de 135 signes, un petit message
tapé sur un téléphone portable, pour déclencher la consternation dans
tout le pays et la risée de l'étranger.
Valérie Trierweiler n'a pas compris, ou pas admis, ce qu'impliquait
d'être la compagne d'un Président. Elle affaiblit le chef de l'État,
trouble la gauche, met le PS en porte-à-faux et
provoque des dégâts à La Rochelle, ville emblématique de la
traditionnelle rentrée des socialistes.
La politique, c'est autant l'onde de choc d'un fait ou d'un mot que
le fait ou le mot lui-même. Pour l'avoir ignoré, Nicolas Sarkozy en a
fait les frais par le passé. Le sachant, François Hollande risque malgré
lui d'en subir l'impitoyable conséquence. En attendant de savoir
quelles traces durables cette affaire peut laisser, les socialistes
redoutent qu'elle ne détourne un peu plus du vote, des enjeux ou du
débat sur les « valeurs communes » entre l'UMP et le FN.
De la mobilisation de dimanche dépend le retour du Front national à
l'Assemblée, l'évaporation du MoDem et, surtout, le score de la gauche.
Le PS et ses alliés (radicaux, chevènementistes, écologistes) devraient
obtenir la majorité absolue. Sauf découra gement de son électorat, la
majorité « hollandaise » n'aurait pas besoin du Front de gauche, sans
doute réduit à une dizaine d'élus et privé de groupe.
Cette configuration est capitale, car il en va de la cohérence et du
sérieux des choix budgétaires et fiscaux, après plusieurs annonces
généreuses, dans un environnement hostile. Les indicateurs se dégradent.
Les impôts rentrent mal. L'automobile et les collectivités sont aux
abois. La France, condamnée par la Cour de justice européenne, doit
débourser 4,3 milliards de trop-perçu d'impôts sur des capitaux
étrangers. La crise bancaire alourdit nos engagements, pour l'instant
sous forme de garantie. Il ne manquerait plus que la Grèce, qui vote
aussi dimanche, s'en aille en faisant vaciller le château de cartes de
l'euro.
Dans ces conditions, une politique à géométrie variable, à coups de
compromis, tantôt avec la gauche radicale, tantôt avec les centristes,
serait difficile à piloter. Conscient du danger, Jean-Marc Ayrault
rappelle que de nombreux sièges peuvent se j ouer à quelques dizaines de
voix.
Ce second tour est d'autant moins un détail que l'exécutif - la
cohabitation n'est plus envisagée - a besoin de conforter sa légi timité
à travers le Parlement. Or, dimanche soir, on aura une majorité portée,
en réalité, par un quart de l'électorat. Ce ne serait pas gênant si
l'heure était à distribuer les fruits d'une croissance opulente. C'est
un gros handicap quand il s'agit de demander à un peuple, dont les trois
quarts s'opposent ou se désintéressent, d'être solidaire dans l'effort,
fût-il juste.
Même si c'est le quatrième en deux mois, le vote d'après-demain est tout sauf une formalité.
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