TOUT EST DIT

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samedi 4 février 2012

Les vérités viennent au jour

« On n'attrape pas les mouches avec du vinaigre », dit l'adage. Pourtant, cette campagne présidentielle présente aux citoyens électeurs une situation plutôt amère. Nous étions habitués, en de telles circonstances, à entendre de douces promesses. C'est le contraire qui se produit. Chacun des candidats y va de bon coeur dans l'austérité, la hausse des impôts directs ou indirects, la chasse aux niches fiscales, le ratissage des plus-values, etc.

Serait-ce donc qu'enfin, dans notre démocratie, aurait sonné l'heure des vérités ? Ces vérités que nous n'aimons pas beaucoup entendre car elles nous renvoient souvent à notre image de cigales trop dépensières. Elles nous rappellent notre endettement inconsidéré, si démesuré qu'il nous plonge dans une crise sans précédent. Il faut en sortir, disent en choeur les prétendants à la présidence de la France. Ils ont raison et, de plus, ils sont d'accord, ce qui est bien rare. Évidemment, ils diffèrent quelque peu sur les moyens, mais économies et prélèvements sont aux programmes.

Cependant, il faudrait en priorité s'efforcer de sauver le système social français même si bien des avantages acquis l'ont été à crédit. Sans emprunter davantage, comment sauver un système qui a tout de même réussi à faciliter la vie, à améliorer la santé, à soutenir les victimes du chômage ? Tout cela qui est une si précieuse mise en pratique de la solidarité indispensable à la vie en société.

Mais, étrangement, un certain nombre de questions restent absentes du débat. Il en est ainsi par exemple de la dépendance, celle des personnes fragiles, âgées et souvent démunies. « En ce jour, je viens vous faire part de la profonde détresse de la maison de retraite où je vis depuis bientôt deux ans », nous écrit, de Saint-Malo, une dame âgée. Elle poursuit : « Aujourd'hui, la situation s'aggrave et le personnel, malgré son dévouement, arrive difficilement à donner aux malades les soins nécessaires et constants. Il faudrait une somme importante pour pouvoir obtenir plusieurs emplois supplémentaires. »

Dépendance, banlieues, trop oubliées

Comment faire face et préparer l'avenir car, d'ici à 2050, le nombre des personnes de plus de 75 ans aura doublé et atteindra 11 millions ! Le nombre des personnes dépendantes devrait progresser de 1 % par an d'ici à 2040 (1). Mais on ne trouve à ce propos que deux ou trois lignes perdues dans les programmes électoraux.

Il en est de même pour les banlieues. Pourtant, nous sommes régulièrement alertés sur les problèmes qu'elles posent. Ainsi, Gilles Kepel souligne dans le livre qu'il vient de publier, Quatre-vingt-treize (Gallimard), que les banlieues restent un territoire d'exclusion de la société où se vit « une citoyenneté inaccomplie ». Il pense que ce sujet est délibérément occulté dans cette campagne (2). Pourtant, « quand des quartiers représentent 10 % de la population, on s'attendrait à ce que les candidats fassent des propositions », déclare le maire de Rilleux-la-Pape, dans le Rhône (3). Et le maire de Drancy lui fait écho : « Je suis consterné qu'aucun des candidats déclarés n'en parle. » « C'est parce que les banlieues votent peu que les partis ne s'intéressent pas à leur population », ajoute Céline Braconnier, maître de conférence à Cergy-Pontoise.

Et combien de députés originaires des banlieues siègent au Parlement ? « Je mets en garde nos responsables politiques, clame Gilles Kepel. Ne traitez pas cette question à la légère... Si les politiques ne sont pas capables de s'emparer d'un débat comme celui-ci et d'y réfléchir, le débat s'emparera d'eux et les prendra au dépourvu. Il faut engager des mesures pour favoriser l'insertion sociale et l'accès au travail de ces populations massivement jeunes. »

La vérité de notre situation, c'est aussi ces questions trop souvent laissées de côté alors qu'elles sont brûlantes et alimentent des désespoirs silencieux d'un côté et, de l'autre, de jeunes colères porteuses de révoltes.



(1) La Croix, 02/02/2012

(2) Libération, 02/02/2012

(3) Le Monde, 03/02/2012

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