TOUT EST DIT

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samedi 4 février 2012

Le nouvel ordre

Cette fois-ci, il n’était pas question de sommet de la dernière chance. Le Conseil européen qui s’est tenu le 30 janvier aura pourtant des conséquences importantes. Les Vingt-Cinq, puisque le Royaume-Uni et la République tchèque ont refusé de s’y associer, ont adopté le pacte fiscal et budgétaire que l’Allemagne, suivie par la France, voulait leur imposer.

Dès que douze Etats auront ratifié le texte qui devrait être signé en mars, les pays adhérant au pacte n’auront plus le droit de déclarer un déficit annuel supérieur à 0,5% du PIB, et encourront des sanctions automatiques si leur déficit dépasse la barre des 3%. En résumé, la politique économique de la quasi-totalité des Etats européens devra désormais s’inscrire dans un cadre européen strict et immuable.

C’est la conséquence logique du traité de Maastricht et de l’introduction de la monnaie unique, mais c’est un pas que les dirigeants européens de l’époque n’avaient pas osé franchir. Sous la pression des événements, les dirigeants d’aujourd’hui se sont plus que jamais approchés de l’Europe fédérale – ou ils ont abandonné encore un peu plus de la souveraineté de leur pays, selon le point de vue duquel on se place.

La discipline merkelienne va donc régner. Mais la crise de la zone euro n’en est pas réglée pour autant. Le risque d’une faillite de la Grèce n’est toujours pas écarté, car Athènes, ses créanciers privés et la troïka se renvoient la responsabilité, chacun demandant aux autres des efforts supplémentaires.

Ce n’est pas la découverte d’un trou supplémentaire de 15 milliards d’euros dans les finances grecques qui va faciliter les discussions. Ni la proposition allemande – non officialisée – de nommer un commissaire au budget pour placer la Grèce sous tutelle.

D’autre part, les agences de notation, Standard & Poor’s en tête, n’auront peut-être pas l’amabilité d’attendre la ratification du pacte budgétaire avant de dégrader de nouveau quelques pays.

Enfin, la manière dont ce pacte a été adopté laisse un goût amer, qui annonce des difficultés à venir. Nul ne devrait se réjouir de ce que Londres et Prague aient préféré rester à l’écart, même si la politique intérieure a joué un grand rôle dans leur décision.

Une Europe sans les Britanniques serait plus faible dans le monde, et l’Europe centrale a plus que jamais besoin d’un ancrage européen stable : la Hongrie s’affranchit de plus en plus des règles communes ; la Slovaquie s’enfonce dans un scandale de corruption aux conséquences imprévisibles et la Roumanie ne fait peut-être que commencer à se révolter contre l’austérité.

En Irlande, les arrangements pour que le pacte soit rédigé de manière à éviter un référendum pourraient avoir l’effet inverse et menacer le plan de sauvetage mis en place en 2010. En Grèce, enfin, tout le monde, sauf apparemment Angela Merkel et les négociateurs de la troïka, se rendent compte que quelles que soient les insuffisances des autorités, la population se rapproche dangereusement du point de rupture.

Au milieu de tout cela, l’Allemagne continue de dessiner une Europe à sa manière, à la fois “libérée” du partenariat avec un Nicolas Sarkozy affaibli, et réticente à assumer des responsabilités nouvelles qu’elle ne cherchait pas. La conséquence n’est pas seulement économique, mais culturelle.

De plus en plus, les esprits se crispent, les langues se délient, et il devient de bon ton en Europe de renvoyer les Allemands à leur passé nazi ou prussien. Plus insidieuse que les difficultés économiques et sociales, l’émergence de cette tendance, couplée à la montée des nationalismes, est tout aussi inquiétante. Et contre cela, aucun pacte budgétaire n’est efficace.

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