TOUT EST DIT

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vendredi 4 novembre 2011

Le miroir grec du G20

Son costume de coupable est pratiquement parfait. George Papandreou, le premier ministre grec, est à la tête d’un pays à la dérive. Depuis que le masque est tombé sur l’état réel des finances publiques d’Athènes, tous les ingrédients sont là : endettement insoutenable, corruption, évasion fiscale, tensions sociales, délégitimation chronique de la classe politique. La Grèce est le cas d’école de tout ce qu’il ne fallait pas faire. Le grand malade du moment. Celui par qui le redoutable virus de la méfiance serait entré dans la zone euro, à la vitesse du clic angoissant des opérateurs financiers.

Depuis trois ans, ni les nombreux sommets européens, ni le directoire franco-allemand ne sont parvenus à éteindre l’incendie. Pas même le sommet de la semaine dernière, censé déblayer le terrain avant la rencontre de Cannes. Initialement conçu pour exalter la présidence française et inaugurer un nouvel ordre mondial, le G 20 a été obligé hier de passer d’abord par la case grecque. Comme si l’Europe n’avait d’autre costume à présenter que celui de ses divisions.

Le paradoxe grec, qui veut que ce petit pays de dix millions d’habitants soit élevé au rang de parfait mauvais exemple, n’est que la plus éclatante des contradictions du moment. On dénonce par exemple l’évasion fiscale pratiquée à Athènes, mais la suppression des paradis fiscaux a littéralement disparu des agendas du G20. Plus généralement, ne voit-on pas l’Europe, dont le revenu annuel moyen par habitant est de 38 000 dollars, prétendre être sauvée des eaux par la Chine, où ce même revenu ne dépasse pas 4000 dollars ? Les gigantesques réserves de liquidités de Pékin peuvent, en pleine crise des dettes souveraines, sembler providentielles. Mais jusqu’à un certain point, que les dirigeants chinois sont les premiers, d’ailleurs, à ne pas vouloir franchir.

Si on observe une carte du monde reportant les chiffres de la croissance des vingt pays les plus riches, un premier constat s’impose. Deux zones flirtent avec la récession, les Etats-Unis et l’Europe, tandis que partout les émergents, grands ou moyens, se développent. Le sommet de Cannes, à défaut d’instaurer un nouvel ordre, photographie très clairement la montée en puissance des émergents.

Ces pays, la Chine et le Brésil pour ne citer que les plus vigoureux, sont venus à Cannes à la fois inquiets et prudents. Inquiets des répercussions sur leur économie de la crise de l’euro, et prudents quant à la manière d’aider la monnaie européenne. Plutôt que le Fonds européen de stabilité financière, c’est le FMI, levier de puissance, que Pékin et Brasilia privilégient. Ils attendent en outre, en retour, des avancées sur certains dossiers ligitieux : les barrières douanières en matière agricole pour le Brésil, ou les mesures anti-dumping de Bruxelles pour la Chine.

La crise de la dette souveraine tend, inexorablement, à se muer en crise de la souveraineté. L’argent des émergents aura un prix politique que l’Europe ne mesure pas encore pleinement. Le prix que tout débiteur doit à son créditeur. Le prix aussi du modèle qui tend à devenir dominant. Or, la crise de l’euro, ses égoismes nationaux, ses tragédies grecques, pose, déjà, un défi à nos démocraties. L’électrochoc provoqué par le référendum de Papandreou est peut-être, là encore, un révélateur. Un réveil-matin à ne pas négliger.

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