TOUT EST DIT

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jeudi 13 octobre 2011

Socialisme primitif

Nous avons eu des primaires socialistes, mais pas de socialistes primaires. Ils restent primitifs.
Oui, je sais : depuis que le grand humaniste que fut Jacques Chirac l’a décrété, on ne doit plus parler « d’art primitif », mais « d’art primaire ». Primaire, cela veut dire qu’il y a eu innovation : l’art s’est développé à partir de premières expressions qui contenaient tous les éléments de sa croissance future. Primitif, cela implique une forme désuète dont on ne doit garder qu’un vague souvenir et qui n’a sa place que dans les musées ou les grottes.
Alors, les socialistes français : primaires ou primitifs ?

La réponse ne fait guère de doute. Nos socialistes s’étaient alliés avec communistes et radicaux de gauche pour proposer dès 1973 un Programme Commun qu’ils ont soigneusement appliqué pendant les tout premiers mois du septennat Mitterrand. Entre 1973 et 1981, ils n’avaient pas eu le temps d’adapter ni leur discours ni leurs mesures au changement radical de politique qui s’effectuait alors, dans le sens du libéralisme. Thatcher (1979), puis Reagan (1980) avaient donné le ton. Les « chocs pétroliers » avaient enfin eu raison de quarante ans de dirigisme et de keynésianisme, une période appelée à tort celle des « trente glorieuses ».
C’est ce même décalage que l’on retrouve aujourd’hui. Nos socialistes cultivent la nostalgie des lendemains qui chantent – le chant des sirènes sans doute. Ils sont toujours viscéralement contre le capitalisme, contre le marché, contre les riches, contre les patrons. Ils sont toujours viscéralement pour l’étatisme, pour la réglementation, pour la redistribution, pour la lutte des classes. « Je suis marxiste » déclarait François Mitterrand à la veille de son élection en 1981. Les candidats présents à ces primaires lui font implicitement écho, même s’ils n’ont pas la franchise de dire « Nous sommes marxistes ».
Les commentateurs essaient de percevoir des nuances entre les candidats. Hollande, vainqueur annoncé de la consultation, ne serait-il pas plutôt social-démocrate, voire centriste ? Manuel Valls ne serait-il pas quelque peu libéral, puisqu’il est le seul à avoir fustigé l’archaïsme de son parti ? Montebourg ne serait-il pas le plus gauchiste de tous, et Martine Aubry la plus traditionnelle fille de la SFIO ? C’est, à mon sens, faire trop de crédit à ces braves gens, car tous ont apposé leur signature au bas du programme du PS.
Il y a bien sûr une large part de démagogie dans ces 30 propositions. Qui ne serait pas en faveur de « la réussite de chaque jeune » ou pour « l’épanouissement des tout petits », ou pour « remettre l’hôpital au cœur du système de santé ». De même, certaines propositions rejoignent hélas, les discours de certains à droite : émission d’emprunts européens, fusion de l’impôt sur le revenu et de la CSG et progressivité accrue, des droits de douane européens, une TVA verte et bien d’autres mesures qui définissent le « politiquement correct » français.
Mais il y a malgré tout le « socialistement correct » : attaque des sociétés, attaque de la finance, mépris pour la propriété (blocage des loyers, interdiction des licenciements « boursiers » (?), alignement de la fiscalité du capital sur celle du travail (bonne idée !), et enfin une banque publique d’investissement (l’appellera-t-on Gosbank, comme en URSS ?).
On me fera remarquer, non sans quelque raison, que le socialistement correct a pénétré aussi les rangs de la majorité présidentielle. J’ai protesté contre cette droite « caméléon », qui mange à tous les râteliers, y compris ceux des gauches et droites les plus extrêmes. Je ne sais, finalement, ce qu’il y a de pire : une droite illisible, ou des socialistes trop lisibles pour être suivis.
Comme les choses seraient plus simples si les socialistes français, à l’instar de la plupart des socialistes du monde entier, acceptaient pour bases de l’économie la libre entreprise et le libre échange, et pour bases de la société le respect de la propriété et le jeu de la responsabilité !
Dès 1959, les socialistes allemands, avec la Charte de Bad Godesberg, avaient rompu avec le marxisme. C’est un chancelier socialiste, Gerhard Schroëder, qui a rendu au marché du travail sa fluidité, ce qui vaut à l’Allemagne un taux de chômage qui est la moitié de celui de la France. En Nouvelle Zélande et en Australie, ce sont les socialistes qui ont réformé les retraites en passant de la répartition à la capitalisation. Au Canada, ce sont les gauchistes du Parti Libéral qui ont privatisé et réduit de 75 % le nombre des fonctionnaires.
Nous avons eu des primaires socialistes, mais pas de socialistes primaires. Ils restent primitifs.

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