TOUT EST DIT

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jeudi 6 octobre 2011

Austérité: les Grecs n'en peuvent plus

L'Europe souhaite imposer des coupes supplémentaires dans les salaires des Grecs. Le Premier ministre refuse un nouveau massacre social. De fait, le quotidien de la population devient de plus en plus insoutenable. Témoignages.

La Grèce "ne deviendra pas l'Inde". C'est avec ces mots que le Premier ministre grec, Georges Papandréou, a répondu aux créanciers du pays qui lui réclament de nouvelles coupes dans les salaires du privé et une baisse du salaire minimum. Le pays ne respectera pas ses objectifs de réduction du déficit cette année, ses prêteurs réclament des sources supplémentaires d'argent frais avant de lui accorder le versement d'une nouvelle tranche d'aide de 8 milliards d'euros. "Nous sommes du côté des travailleurs et nous assurons la protection de leurs droits collectifs", a ajouté le Premier ministre. Il faut dire que depuis l'éclatement de la crise grecque, en 2009, les mesures d'austérité imposées ont entraîné la population vers un quotidien de plus en plus insoutenable. Témoignages.
40% de salaire en moinsFotini, 32 ans, est mariée et a deux enfants. Elle est directement touchée par la baisse des salaires imposée par les plans d'austérité. Elle le raconte dans un témoignage au Monde. "40% en moins sur mon salaire à 1400 euros brut, 20% en moins sur le salaire de mon mari à 1300 euros brut. L'augmentation de tous les produits et les services, essence, nourriture, tickets de transports..." Sa famille est également touchée par l'austérité. "Ma soeur, diplômée de la grande école polytechnique d'Athènes, est au chômage, ma fille aînée de 2 ans et demi n'a pas de place à la crèche municipale, alors il faut payer 500 euros par mois pour l'inscrire dans une crèche privée. Notre loyer de 600 euros, lui, est resté stable. Mais avec toutes les dépenses fixes, il ne nous reste que 300 euros par mois pour vivre."
Les pensions de retraite abaissées de 20%Anastasia est une ancienne danseuse professionnelle. Elle touche sa retraite depuis six ans mais l'a vue rabotée de 20% à 1500 euros. Elle témoigne de la difficulté du quotidien dans une interview à la radio suisse romande. "Vers la fin du mois je suis vraiment fauchée. La vie est devenue plus chère, au supermarché, les aliments, l'énergie. C'est déprimant, on voit des gens perdre leur boulot. Je vis avec ma mère qui a aussi une retraite. On s'aide, sinon je ne pourrai pas toute seule. J'ai trois enfants qui ont 22, 24 et 26 ans et qui n'ont pas encore de travail. C'est très injuste de baisser le salaire des gens qui ont toujours été corrects avec la loi. C'est blessant. Je n'ai pas le droit de prendre un travail en même temps que ma retraite, même pas dans une école de danse. Si je fais ça on me coupe une grande partie de ma pension. J'ai aussi très peur des révoltes, que le pays fasse faillite et qu'on ne touche même plus notre retraite. Je suis très, très inquiète."
Le chômage touche 4 jeunes sur 10La jeunesse grecque est très touchée par l'austérité. Laurane Chytiris est une étudiante greco-suisse en littérature française à l'université d'Athènes. Elle témoigne: "Je pense à quitter la Grèce une année pour aller passer mon master ailleurs. Si la situation ne s'arrange pas, je ne reviendrai pas. J'ai beaucoup de connaissances qui regardent sur internet pour aller vivre en Angleterre ou en France. Ils voient bien que c'est insupportable ici. Il y a des jeunes de 30 ans qui vivent toujours chez leurs parents. Ils ont un travail mais n'ont pas les moyens de payer un loyer avec ce qu'ils gagnent." Et ce chômage ne touche pas que les jeunes. Le gouvernement annonce un chiffre officiel à 16,3%, les syndicats parlent plutôt de 23%.
L'enfer de la recherche d'emploiDimitri a 33 ans. Il est informaticien au chômage, reconverti en instituteur après la faillite de sa société au début de la crise. "J'ai fait des remplacements comme instituteur, mais je n'ai pas eu de poste à la rentrée, j'espère en avoir un d'ici quelques mois", dit-il néanmoins avec espoir. En attendant, il touche encore 400 euros par mois d'allocation chômage qui s'arrêteront dans quatre mois. Pour ses besoins immédiats, il s'appuie sur ses économies et sa famille car son loyer est de 500 euros par mois. A terme, lui aussi ne voit pas d'autre solution que quitter la Grèce. Il participe à une opération de recrutement pour émigrer vers l'Australie. "Quand je pense à tout ce qu'on a fait pour avoir des diplômes, pour être prêt. Ce n'est pas ma génération qui a créé cette dette, et même si nous la rééchelonnons, cela veut dire que des gens qui ne sont pas encore nés aujourd'hui devront la repayer encore dans trente ans".Les petits commerces mettent la clé sous la porte
Le "triangle du commerce" d'Athènes n'est plus ce qu'il était. Dans ce haut lieu du business de la capitale grecque, près de la place Syntagma, la mode est au rideau baissé. Selon la Conféderation nationale du commerce grec (ESEE), plus de 20% des petits commerces ont disparu à Athènes depuis 2010. "Personne ne nous donne un coup de main", regrette Themis Lizardos sur Reuters, un joallier du quartier qui n'a pas encore baissé le rideau. Mais à ce rythme là cela ne devrait pas tarder. "Il n'y a qu'un seul coup de main, celui qui presse nos têtes et nous la maintient sur le sol", ajoute-t-il. Des dizaines de milliers de petits commerces ont fermé dans tout le pays après la mise en place du premier plan d'aide européen de 110 milliards d'euros, et la promesse de mesures d'austérité draconiennes par le gouvernement.
L'immobilier, prochain épicentre de la crise?Théodore Pelahaidis, est professeur d'économie à l'université d'Athènes. Selon lui, la prochaine crise sera immobilière en Grèce. Et on ne peut pas y faire grand chose. Il l'affirme à la radio suisse romande. "Quand l'épargne des ménages aura été dépensée dans les prochains mois, qu'est ce que les gens vont faire ? Ils vont vendre leur maison. Mais si vous vendez, les propriétés vont entrainer les prix à la baisse. Donc la prochaine étape qu'on va subir c'est une crise de l'immobilier. Et on va encore aggraver la crise actuelle."

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