TOUT EST DIT

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vendredi 16 septembre 2011

Six manières d'être de gauche

S'il avait voulu faire de la primaire un événement secondaire, et éviter à Alain Juppé de remuer le passé au procès Chirac, Nicolas Sarkozy n'aurait pas trouvé meilleure conjonction. En tout cas, son voyage éclair en Libye ne lui permet pas seulement de cueillir les lauriers du succès diplomatico-militaire le plus probant de son quinquennat.

Mais parce que les événements ne sont pas comparables, la liesse à Benghazi ou le spectre d'une implosion de l'Europe n'enlèvent rien à l'innovation que constitue le départage public et démocratique de candidats à la présidentielle. En témoigne l'attention portée à la longue confrontation télévisuelle d'hier soir.

Jean-Michel Baylet l'inconnu, Manuel Valls l'iconoclaste et Arnaud Montebourg l'avocat énergique de la démondialisation avaient tout à gagner d'une aussi prestigieuse tribune. Il était donc de leur intérêt d'affirmer leurs différences pour gagner en influence et prendre date.

Le faisant, ils bousculent un programme socialiste trop timoré pour l'un, trop coûteux pour l'autre, trop irréaliste pour le troisième, et tiennent des propos tellement asymétriques, sauf sur la critique de Nicolas Sarkozy, que l'on cherche parfois la cohérence.

Pour François Hollande, Martine Aubry et Ségolène Royal, l'exercice était d'une autre nature. Il leur fallait relever des défis déterminants pour la suite : comment se présidentialiser tout en restant soi-même ? Comment se distinguer tout en préservant l'unité ? Et surtout, comment séduire tout en restant crédible sur le fond ?

S'agissant de la forme, chacun a pris soin de ne pas agresser l'autre. C'était prévisible : le premier qui attaquerait perdrait immédiatement. Ce qui a pu compliquer le jeu de ceux ¯ ou plutôt de celles ¯ qui auraient eu besoin de se différencier pour combler leur retard dans les sondages.

François Hollande, lui, avait surtout à entretenir son capital d'intentions de vote. Bon débatteur, vif, ferme dans le ton, plus présidentiel et plus stratège, il semble avoir préservé son acquis. Plus démonstrative que charmeuse, soucieuse de rassembler, Martine Aubry peine toujours à fendre l'armure. Quant à Ségolène Royal, elle continue de mélanger des phrases-slogans, dont on ne voit pas toujours la traduction concrète, et des démonstrations simples dont il ne faut pas sous-estimer l'impact.

Mais c'est bien évidemment sur la crédibilité du projet que les présidentiables étaient attendus. Car entre décevoir les Français ou plomber les comptes publics, on a besoin de voir clair. On comprend bien la priorité de François Hollande donnée à l'éducation ou aux « contrats de génération »; on voit bien l'intention de Martine Aubry avec ses 300 000 emplois d'avenir. Mais on s'interroge toujours, comme Ségolène Royal, comme Manuel Valls surtout, sur le niveau de l'impôt ou sur l'ampleur des économies pour les payer.

Ainsi, même si chacun répète, au risque de ne pas faire rêver, qu'il faut dire la vérité aux Français, les projets sont assez différents, sur les déficits, sur le rythme de décroissance du nucléaire, sur le cannabis. Ce premier débat aura-t-il clarifié les positions ? Au bout du compte, on n'aura rien appris de neuf. Toutes les idées, toutes les formules ont déjà été entendues. Mais séparément. Et c'est là le mérite - ou le danger - de cette confrontation, civilisée sans être langue de bois, elle aura souligné les divergences plus que les convergences.

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