mercredi 23 février 2011
« Le Mai 68 des pays du Sud »
Les instigateurs férus d'Internet des révolutions démocratiques arabes s'inspirent tous d'un manuel révolutionnaire, De la dictature à la démocratie (1993), écrit par un mystérieux et influent expert américain, Gene Sharp. Ce best-seller mondial traduit en 30 langues, téléchargeable sur Internet, explique comment renverser pacifiquement les dictatures. Il a été financé par l'Institut Albert-Einstein et la Fondation Georges-Soros. Des opposants tunisiens, libyens, yéménites, bahreïniens ou algériens l'ont étudié. La vague révolutionnaire propulsée grâce à Internet par ce type d'ouvrages n'est pas près de s'arrêter. Ce « Mai 68 du Sud » est en train de gagner l'Asie, comme on le voit l'appel d'hier à manifester en Chine ou les 100.000 syndicalistes défilant dans New Dehli, et bientôt l'Afrique. Les rebelles pacifiques de Libye, du Zimbabwe, d'Iran, de Biélorussie ou même du Turkménistan lisent le manuel de Sharp, interdit par tous les régimes totalitaires. Avant eux, le mouvement Otpor, qui renversa plus efficacement que les bombes américaines le président serbe Slobodan Milosevic en 2000, s'en est inspiré. Mais les techniques de révolution pacifique fonctionnent là où existe un minimum d'ouverture sur l'étranger, d'éducation et de circulation de l'information, ce qui est le cas de la Tunisie, du Maroc, de la Jordanie, de Bahreïn, de l'Inde, mais pas de l'Iran, de l'Arabie saoudite, de la Corée du Nord ou de la Libye. C'est pourquoi Mouammar Kadhafi, au pouvoir depuis quarante-deux ans, n'hésitera pas à provoquer un bain de sang, comme il l'a dit, ainsi que son fils Saïf, plutôt que de se démettre. Sauf si l'armée l'y oblige, car la force des révolutions pacifiques est de discréditer le dictateur auprès de ses propres troupes...
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