TOUT EST DIT

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mercredi 31 mars 2010

Les Etats sont déterminés à taxer les banques, mais chacun à sa façon

Taxer les banques pour épargner au contribuable le coût d'une future crise : le principe devait être entériné, mercredi 31 mars, par le gouvernement allemand. La ministre de l'économie et des finances, Christine Lagarde, était l'invitée exceptionnelle de ce conseil des ministres, signe de la volonté de Paris et Berlin d'aplanir leurs différends sur la gestion de la crise grecque et l'écart de compétitivité franco-allemand.
L'idée d'une taxation des établissements financiers fait désormais consensus au niveau international. Des Etats-Unis à l'Europe, tous les grands pays ont commencé à exposer leurs idées, devançant le rapport que le Fonds monétaire international (FMI) doit remettre en avril au G20 sur ce sujet.

Mais les projets sont, dans leur conception et leurs objectifs, souvent très différents. Le directeur général du FMI, Dominique Strauss-Kahn, a mis en garde, mardi, contre des propositions "sinon totalement, du moins partiellement incompatibles entre elles" et plaidé pour une "solution globale".

Le plan allemand. La réflexion est bien engagée en Allemagne, où l'Etat a mis beaucoup d'argent sur la table pour soutenir des banques, durement ébranlées par la crise. La proposition du ministre des finances, Wolfgang Schäuble, censée être convertie en projet de loi d'ici à l'été, prévoit la création d'une taxe qui viendrait abonder un fonds dit de "restructuration", destiné à rester en dehors du budget fédéral.

Ses ressources seraient mises à disposition en cas de nouvelle crise bancaire. Tous les établissements seraient soumis à cette contribution, qui permettrait de collecter près de 1,2 milliard d'euros par an. L'ampleur du prélèvement dépendra toutefois de la taille des banques et du risque qu'elles font courir au système.

Le plan comprend un autre volet visant à organiser, en douceur, le "démantèlement" d'une banque en grandes difficultés. La Commission européenne comme le FMI demandent en effet aux Etats d'adopter des testaments bancaires. Il s'agit d'une rupture avec le principe du "too big to fail" (trop gros pour faire faillite), qui, sauf dans le cas de Lehman Brothers, a toujours prévalu.

Selon M. Schäuble, le plan allemand a vocation à s'étendre, en concertation avec Paris, à l'échelle européenne. "L'idée d'une taxation internationale est un projet concret qui rassemble la France et l'Allemagne", confirme-t-on dans l'entourage de Christine Lagarde.

En France, rien n'est arbitré. "Nous sommes dans un calendrier plus détendu, toutes les options restent ouvertes", poursuit-on à Bercy, où l'on rappelle à l'envi que l'aide aux banques, pendant la crise, n'a pas servi à les sauver mais à soutenir l'offre de crédits à l'économie. Ce soutien n'a finalement pas coûté à l'Etat, mais lui a rapporté 2 milliards d'euros grâce aux intérêts des prêts.

En clair, la France devrait attendre le rapport du FMI en avril, et les conclusions de la mission confiée à l'ex-président du Conseil national de la comptabilité Jean-François Lepetit sur "la régulation des acteurs et des marchés systémiques", pour forger sa position.

Ni le périmètre de la taxe ni son assiette (banques, assureurs, fonds, etc) ne sont encore établis. Mais l'idée est de bâtir un dispositif de prévention des crises, en taxant les activités les plus risquées, donc les plus dangereuses pour la stabilité du système bancaire.

S'agissant de l'affectation de la taxe –directement au budget de l'Etat ou à un fonds dédié, comme le ferait l'Allemagne–, là encore, la question n'est pas tranchée. M. Lepetit et le cabinet de Mme Lagarde redoutent que la création d'un fonds spécifique n'encourage l'aléa moral, en donnant aux banques le sentiment d'une protection inconditionnelle en cas de crise. Or, martèle-t-on en haut lieu, "l'Etat n'est pas le réassureur des banques".

L'option budget de l'Etat, par ailleurs opportune en période de disette budgétaire, pourrait donc être préférée.

Si toutefois un fonds devait être créé, il serait conçu comme un fonds de résolution des crises, petit et manœuvrable. Il servirait notamment à conduire des opérations de découpe des banques en difficultés.
Anne Michel et Marie de Vergès

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