TOUT EST DIT

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dimanche 17 octobre 2010

Les jeunes sont-ils vraiment concernés par la réforme des retraites?

Applaudie par les syndicats et l'opposition, critiquée par la majorité, la mobilisation des lycéens et des étudiants contre la réforme des retraites fait débat. Le point sur les implications pour les jeunes de ce projet de loi. 

 Le 12 octobre dernier a marqué un tournant dans la mobilisation contre la réforme des retraites avec l'entrée en force de la jeunesse dans le mouvement : 150.000 lycéens et étudiants sont venus grossir les cortèges de manifestants. Et alors que la mobilisation des lycéens s'inscrit dans la durée, avec plus de 300 établissements perturbés quotidiennement depuis quatre jours, la polémique fait rage entre la droite et les organisations syndicales sur l'implication de la jeunesse dans ce dossier des retraites. Passage au crible des arguments des uns et des autres.
Cette réforme c'est pour l'avenir des jeunes : faux C'est l'argument principal du gouvernement et de la majorité UMP : les jeunes n'ont pas à manifester contre le projet de réforme car celui-ci vise à préserver le système de retraite par répartition, donc à leur assurer une retraite. Oui, les jeunes sont "concernés" par les retraites et "c'est une raison de plus pour réformer le système des retraites", a déclaré récemment Eric Woerth. "Vous voulez que les jeunes n'aient pas de retraites ? Vous voulez que le système par répartition s'effondre ?", a plaidé le ministre du Travail. Cet argument ne tient pas la route. Tout d'abord parce que le projet du gouvernement repose sur un financement des retraites jusqu' 2018. Rien pour la suite. Or les jeunes d'aujourd'hui prendront leur retraite dans quarante ou cinquante ans. "Nous n'avons aucune visibilité de ce que seront les grandeurs économiques et démographique à l'horizon 2050, souligne Yannick L'Horty, professeur d'économie à l'Université Paris Est et chercheur au CEE (Centre d'étude de l'emploi). Il est donc abusif de dire que cette réforme est pour les jeunes d'aujourd'hui." Ce même argument vaut également pour la gauche et les syndicats qui justifient la participation de la jeunesse au mouvement de protestation en évoquant leur prise de conscience de leur avenir.
Cette réforme pénalise les jeunes aujourd'hui : vrai et faux "Faire travailler plus longtemps les seniors, c'est supprimer des emplois pour les jeunes". Tel est le principal slogan avancé par l'Unef et l'UNL, premières organisations des étudiants et des lycéens, et repris en coeur par les jeunes manifestants dans les cortèges. L'Unef a même chiffré à un million le nombre d'emplois qui ne "seront pas libérés sur le marché du travail" du fait du maintien au travail deux ans de plus les seniors. D'où sort ce chiffre ? Cela correspond au nombre de personnes en emploi par génération, explique Henri Sterdyniak, professeur associé à l'Université de Paris Dauphine et économiste à l'OFCE. Selon lui, effectivement, il y a des vases communicants entre l'emploi des seniors et celui des jeunes : "en période de faible croissance donc d'activité au ralenti, la baisse du nombre de sorties de l'emploi se traduit par une baisse de la création d'emploi." Un argument que réfute Yannick L'Horty : "Il s'agit d'une conception malthusienne et comptable du marché du travail où le nombre de postes n'évoluerait pas, explique-t-il. Et surtout, les emplois libérés par les seniors ne correspondent pas du tout aux profils des juniors en termes de salaire, de secteurs ou de compétences."
Cette réforme pénalise les jeunes demain : vrai Autre chiffre avancé par les organisations syndicales étudiantes : les jeunes accèdent à un emploi stable à 27 ans en moyenne. Selon elles, le report de l'âge légal (de la retraite à taux plein) va donc les conduire à travailler jusqu'à 67 ans pour percevoir une retraite à taux plein. En réalité, l'âge moyen d'insertion dans la vie professionnelle est de 21 ans, variant de 18 ans pour les non diplômés à 24 ans pour les diplômés de masters, selon une étude du Céreq (Centre d'études et de recherches sur les qualifications). Mais il est vrai que la précarité de l'emploi (CCD, missions d'intérim) touche cinq fois plus les 15-24 ans que les autres générations et que 23% des jeunes sortis du cursus scolaire sont au chômage. Ce retard d'insertion dans l'emploi et la hausse de l'âge de fin d'études se traduisent en effet par une baisse sensible de la durée d'emploi cumulée avant 30 ans, de l'ordre de 2,6 à 3 ans, selon une étude de la DRESS. Ainsi, le nombre de trimestres validés pour les droits à la retraite a baissé de 7 trimestres entre la génération 1950 et la génération 1970. C'est donc la réforme des retraites de 2003, qui porte la durée de cotisation à 41,5 années contre 40 auparavant, qui aura les plus lourdes conséquences sur l'âge de départ à la retraite des jeunes. La réforme actuelle du gouvernement en rajoute cependant une couche puisqu'elle porte de 65 à 67 ans l'âge de la retraite sans décote, quel que soit le nombre d'années de cotisation.
En revanche, le passage de 60 à 62 ans les concerne peu.

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