Chaque automne, quand commence en Provence la cueillette des figues et des amandes, l’annonce des prix Nobel vient titiller notre soif d’éthique et de bonheur. De grands savants qui ont œuvré, souvent très discrètement, à l’amélioration de la condition humaine, sont valorisés. Des créateurs porteurs d’humanisme et d’engagement sont reconnus. Des lutteurs des droits de l’homme, et de la nature, apparaissent en pleine lumière. Ainsi, quand "le pays des droits de l’homme" s’enlise dans l’autisme social et le dénigrement de malheureux Roms, nous vient de Norvège un souffle d’air bienveillant.
L’Europe parle donc encore au monde. L’Europe du Nord du moins. Celle où l’on peut, à la fois, être passionné par le dynamisme chinois et l’immense travail de ce pays pour sortir de la misère où le colonialisme l’avait enfermé, et clamer haut les droits de l’homme et l’espérance de la démocratie. Liu Xiaobo rejoint ainsi le dalaï-lama et Gao Xingjian, le merveilleux auteur de La Montagne de l’âme couronné en 2000, dans le trio des trois seuls Chinois ayant reçu un prix Nobel.
Certes, l’art de l’évitement chinois est immense. En 2000, lors de la remise du prix Nobel de littérature à Gao qui, réfugié en France en avait pris la nationalité, l’ambassadeur de Chine à Stockholm (forcément invité à la cérémonie royale) dit à l’éditrice de Gao et à la ministre de la Culture française qui l’accompagnait: "Mon gouvernement est très honoré que les écrivains français se mettent à écrire en chinois."
La repartie était spirituelle. Mais elle masquait mal la tristesse d’un pays qui n’est reconnu que par ceux qui en critiquent le régime. Nous sommes ainsi aujourd’hui face à une double interrogation. Celle d’un monde qui attend une Chine ouverte aux libertés démocratiques. Celle d’une Chine qui attend des prix Nobel en médecine, physique ou économie. Par exemple pour l’ouvrage suivant: Essai sur le passage juste d’une économie planifiée à une économie de marché régulée. Un beau sujet qui reste vierge et que ni l’ex-URSS (ni la CIA de la Guerre froide!) n’ont su écrire.
0 commentaires:
Enregistrer un commentaire