TOUT EST DIT

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samedi 16 octobre 2010

Comment les syndicats comptent les manifestants

De 1 à 10. C'est traditionnellement l'écart observé à Marseille sur le nombre de participants à une manifestation, selon que le comptage a été effectué par la police ou par la CGT. Ainsi, mardi, lors de la sixième journée de mobilisation contre la réforme des retraites, le ministère de l'Intérieur a-t-il recensé 24 500 manifestants sur la Canebière, la CGT 230 000. Plus généralement, en France, l'écart observé est moindre et dépasse rarement 1 à 3, dans le pire des cas.

Comment comptent les syndicats, peut-on dès lors se demander, d'autant qu'un certain nombre de relevés effectués récemment sous contrôle d'huissier et rapportés par la presse (France Soir…) laissent penser que même la police surestime le nombre de manifestants ? La technique, artisanale, est bien rodée. «Nous disposons le long du parcours plusieurs équipes de deux personnes qui comptent le nombre de manifestants par rangée et multiplions à la fin de la journée par le nombre de lignes relevées», indique-t-on à la CFDT. À Paris, le nombre de personnes par rangée est estimé entre 20 et 25. «C'est une moyenne car cela diffère selon la taille de l'avenue, le parcours retenu», observe-t-on au sein de l'organisation de François Chérèque. Une autre méthode consiste à appliquer un nombre de personnes par mètre carré de surface occupée. Encore faut-il connaître la surface en question… «C'est pratique quand les gens sont statiques sur une place mais cela devient compliqué quand ils se mettent à bouger», ajoute la centrale cédétiste.

Les «camarades» du ministère de l'Intérieur

Le chiffre, ville par ville, est ensuite «arrêté dans les territoires en interprofessionnel», précise la CGT. «L'ensemble des organisations présentes à la manifestation, en fonction des relevés sur le terrain, décide du nombre de personnes qui sera communiqué au niveau confédéral», ajoute-t-on. Il n'est donc pas exclu qu'en fonction du message que l'on souhaite envoyer, les données soient un peu (ou beaucoup, comme à Marseille) gonflées. «C'est clair que le total est parfois un peu pifométrique ou orienté», reconnaît un leader syndical qui considère toutefois que «l'important n'est pas le chiffre brut du nombre de manifestants, mais la tendance sur plusieurs mobilisations».

Pour obtenir le nombre total de manifestants dans toute la France, il suffit donc d'agréger l'ensemble des résultats des villes. C'est ce que fait chaque confédération lors de chaque journée de mobilisation. Avec parfois, sur la base des mêmes données, des résultats qui peuvent varier. Ainsi, le 7 septembre, la CFDT a recensé 2,5 millions de manifestants dans la France alors que la CGT en comptabilisait 2,74 et Solidaires (syndicats SUD), plus de 3 millions.

Pour la CGT, où la question du comptage des manifestants agace, le sujet serait simplement dépassé. «La réalité sociale est bel et bien là, quelle que soit la méthode de comptage, s'emporte-t-on à la direction de la centrale de Montreuil. Trois Français sur quatre soutiennent les mobilisations et rejettent cette réforme. On est sur un blocage social et le reste importe peu.» L'entourage de Bernard Thibault relève encore que des «camarades» du ministère de l'Intérieur leur «communiquent souvent avant le départ des manifestations le résultat qui sera annoncé en fin de journée». Et laisse ainsi sous-entendre que le nombre de manifestants émanant de la Place Beauvau est peut-être, lui aussi, fonction des intérêts de l'exécutif…

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